La guerre d’Algérie pour ceux qui n’y connaissent rien
OBJECTIF BAC : cet article fait partie des fiches de révision pour les futurs bacheliers.
Entre 1830 et 1848, la conquête de l’Algérie par la France se fait dans la violence: plus du tiers de la population du pays est tuée par l’armée française… Au même titre que l’Indochine, l’Algérie est donc une colonie française depuis 1848, mais celle-ci a la particularité d’être une colonie de peuplement: là où à peine quelques dizaines de milliers de Français partent s’installer en Indochine, pas moins d’un million de « Pieds-Noirs » vivent en Algérie dans la première moitié du XXè siècle.
Même si les 8 millions d’autochtones obtiennent la nationalité française en 1944, les inégalités sociales et politiques persistent entre le peuple colonisé et les Français d’Algérie. Toute l’économie du pays est entre les mains des Français, les Algériens étant quant à eux cantonnés à des travaux à faible valeur ajoutée.
Messali Hadj est l’un des premiers indépendantistes. Il commence ses actions politiques dès les années 1930, son mouvement se radicalisant de plus en plus. A partir de la fin de la seconde Guerre Mondiale, des manifestations populaires sont réprimées dans le sang par l’armée française.
– Vous avez des exemples?
– Oui, bien sûr, Kevin. Le 8 mai 1945, une manifestation tourne à l’émeute à Sétif, ville située à l’Est du pays. Les Français sont pris pour cible: une centaine d’entre eux périront sous les coups des émeutiers.
– Et comment réagit la France?
– Violemment! L’armée française tape dans le tas et tue plus de 20.000 Algériens…
Il faudra néanmoins attendre 9 ans pour que les indépendantistes montent leurs réseaux clandestins et que la guerre explose: le FLN, ou Front de Libération Nationale, est créé en novembre 1954. Dans la foulée, le FLN organise « l’insurrection de la Toussaint », une série d’attaques surprises perpétrées contre les Français. Ces attentats marquent « officiellement » le début de la guerre d’Algérie.
Le gouvernement français ne compte pas laisser ces attentats impunis. En réaction, l’armée française mène de violentes répressions. Mais parallèlement à l’action armée, la France tente également d’établir une vraie politique d’intégration, en favorisant par exemple la scolarisation des jeunes Algériens. Des initiatives louables, il est vrai, mais qui arrivent bien tard… Le FLN s’y oppose et continue de semer la terreur.
– Encore d’autres massacres?
– Oui, notamment ceux du Constantinois en Août 1955. Le FLN ouvre le feu contre la population civile d’origine européenne. La France réagit à peu près de la même façon qu’à Sétif 10 ans plus tôt, et les deux camps tombent l’un et l’autre dans l’horreur, abandonnant à jamais tout espoir de paix.
– Quel genre d’horreurs?
– Par exemple, l’armée française fait envion 2.000 prisonniers parmi la population locale et les emmène dans le stade de la ville de Skikda pour les interroger. En fait d’interrogatoire, ils sont tous massacrés à la mitrailleuse lourde puis enterrés dans une gigantesque fosse commune…
– Ah oui… en effet…
– Ne diabolisons pas un camp ou l’autre pour autant… Le FLN rivalisait largement dans l’horreur avec l’armée française!
Après de telles atrocités, fini le rêve français de l’intégration… C’est maintenant une politique de « guerre à outrance » qui est menée par Robert Lacoste, le nouveau ministre résident. Pas moins de 400.000 soldats français sont maintenant déployés sur le sol algérien. Le point d’orgue du conflit a lieu à Alger, entre janvier et septembre 1957. Le Général Massu obtient les pleins pouvoirs. Lui et ses 6.000 parachutistes ont pour mission de déloger le FLN qui dispose de nombreuses cellules au coeur d’Alger. Massu parvindra à remplir sa mission… mais au prix de la généralisation de la torture et des exécutions sommaires, tolérées par l’ensemble des pouvoirs publics français.
– C’est vraiment ignoble!
– Oui, c’est vrai, c’est ignoble. Mais comme je te l’ai déjà dit, l’armée française fait également face à des indépendantistes du FLN qui sèment la Terreur. Difficile, dans ces conditions, de mener une guerre « propre », si tant est que cet oxymore ait un sens…
La vie politique française est également dans la tourmente. En mai 1958, un coup d’Etat à Alger aggrave encore plus l’instabilité politique de la quatrième République. Ce putsch, mené par Pierre Lagaillarde et soutenu par le général Massu, a pour but de s’opposer au gouvernement de Pierre Pfimlin qui est accusé de vouloir négocier avec les indépenantistes algériens. Le but du général Massu et de ses acolytes est donc de s’opposer à Paris et de maintenir coûte que coûte l’Algérie au sein de la République française.
On s’en doute, ce coup d’état ébranle littéralement le régime. La France a maintenant besoin d’un homme providentiel qui soit capable de sortir de cette crise majeure. Cet homme, c’est bien sûr le Général de Gaulle qui est rappelé au pouvoir en juin 1958. Le 4 juin de la même année, il lance du haut de son balcon à une foule amassée autour de lui son célébre « Je vous ai compris! ». Les Pieds-noirs pensent avoir enfin trouvé un homme politique qui les soutienne. Ce sentiment est renforcé deux jours plus tard quand de Gaulle lance: « Vive l’Algérie française! »
En avril 1961, pourtant, il trahit les Français d’Algérie et les militaires en parlant d’un état algérien indépendant et souverain… Cette trahison amène une nouvelle tentative de putsh, appelé le putsch des Généraux, le 22 avril 1961. Mais, cette fois, la tentative de coup d’Etat échoue…
Finalement, les accords d’Evian sont signés le 18 mars 1962, dont la conséquence est le cessez-le-feu immédiat sur tout le territoire algérien. A la suite d’un référendum le 3 juillet 1962, la France reconnaît finalement l’Algérie indépendante. En 4 ans, le Général de Gaulle est donc parvenu à sortir la France d’une crise inextricable au prix, il est vrai, de la trahison de sa propre parole.
– Ouais, mais bon, si ça a pu mettre fin à la guerre, c’est un détail, non?
– Peut-être pour toi, Kevin, mais certains lui en ont voulu mortellement! A tel point que de Gaulle a été la cible d’un attentat, appelé « attentat du Petit-Clamart », le 22 août 1962, organisé par l’OAS.
– L’OAS?
– L’Organisation Armée Secrète, c’est une organisation française créée en 1961 qui lutte désespérément pour maintenir l’Algérie dans le giron de la France.
– Et de Gaulle s’en sort?
– Oui, bien sûr! Il mourra bien plus tard, en 1970, dans son petit village de Colombey-Les-Deux-Eglises après s’être retiré définitivement de la vie politique.
Il ne faut pas croire que les Accords d’Evian marquent la vraie fin de la guerre d’Algérie… Près d’un million de Pieds-noirs sont mis à la porte de chez eux et s’exilent en métropole, dans des conditions très difficiles. L’OAS continue encore les affrontements avec l’armée. Les harkis, surtout, subissent la vengeance effroyable des Algériens du FLN.
– Les harkis? C’est qui eux?
– C’est, grosso-modo, les Algériens qui ont choisi de lutter du côté des Français entre 1957 et 1962… On imagine leur sort une fois que la France s’est désengagée des combats et les a laissés livrés à eux-mêmes…
– En effet, c’est pas très fair-play…
– Fair-play? Maurice Allais considère carrément que c’est « une des plus grandes ignominies, une des plus grandes hontes de toute l’Histoire de France »…
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Djinnzz
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lien vers http://www.dailymotion.com/video/xl0lyn_hocine-le-combat-d-une-vie_news
En 1975, quatre hommes cagoulés et armés pénètrent dans la mairie de Saint Laurent des arbres, dans le département du Gard. Sous la menace de tout faire sauter à la dynamite, ils obtiennent après 24 heures de négociations la dissolution du camp de harkis proche du village. A l’époque, depuis 13 ans, ce camp de Saint Maurice l’Ardoise, ceinturé de barbelés et de miradors, accueillait 1200 harkis et leurs familles. Une discipline militaire, des conditions hygiéniques minimales, violence et répression, 40 malades mentaux qui errent désoeuvrés et l’ isolement total de la société française. Sur les quatre membres du commando anonyme des cagoulés, un seul aujourd’hui se décide à parler.
35 ans après Hocine raconte comment il a risqué sa vie pour faire raser le camp de la honte. Nous sommes retournés avec lui sur les lieux, ce 14 juillet 2011. Anne Gromaire, Jean-Claude Honnorat.
Sur radio-alpes.net – Audio -France-Algérie : Le combat de ma vie (2012-03-26 17:55:13) – Ecoutez: Hocine Louanchi joint au téléphone…émotions et voile de censure levé ! Les Accords d’Evian n’effacent pas le passé, mais l’avenir pourra apaiser les blessures. (H.Louanchi
Cette manière de vouloir équilibrer les responsabilités des atrocités durant la guerre pour expliquer l’impossible intégration algérienne à la France est édifiante ! Deux petits paragraphes sur la colonisation (et cela s’intitule « décolonisation dans la douleur »), c’est vraiment de l’histoire pour ceux qui ne savent rien et n’en sauront pas plus !
Affligeant.
D. M.
Ma chère Djemaa Maazouzi,
Tout d’abord, sachez qu’un commentaire de votre part me touche du fond du coeur (vraiment). Grâce à vous, je viens d’apprendre que j’étais lu par l’élite culturelle québécoise! La classe. (Si vous êtes bien la Djemaa Maazouzi que l’on trouve en première page de Google et qui a un CV long comme le bras).
Ceci dit, du haut de votre (im)pitoyable dédain, je vous invite à nous ouvrir les portes de votre savoir et je suis impatient de lire votre propre analyse du conflit!
Vous avez dû lire l’article en diagonale car je n’évoque pas d’équilibre des responsabilités durant la période de colonisation. J’évoque seulement un équilibre de l’horreur entre les deux camps durant la guerre. Nuance…
Car je n’ai pas bien compris ce que vous reprochiez à l’article.
– Est-ce sa brièveté? Dans ce cas, je rappelle le concept de ce site qui est de distiller chaque jour quelques gouttes de savoir.
– Est-son absence de prise de position politique? Désolé, mais je garde mon opinion politique pour moi: je n’ai pas à en faire l’étalage. Ici, on n’étale que sa culture: ce n’est pas un site d’opinion mais un site de savoir! 😉
– Sont-ce des erreurs dans le texte? Dans ce cas, je vous remercierais de nous en faire part pour les corriger au plus vite.
– A moins que ce soit le concept même de la culture facile d’accès (donc forcément réductrice, on n’a rien sans rien) qui vous gêne?
Je rappelle également au passage que cet article s’inscrit dans le programme officiel du baccalauréat…
Je vous remercie (vraiment) de faire vivre ce site en le commentant, même si, évidemment, une réponse (un peu) moins méprisante et (un peu) plus argumentée aurait été géniale.
Dans l’attente de vous lire,
PS: Avez-vous rendu public votre mémoire de recherche sur « la fabrication de la mémoire et de la communauté dans des imaginaires de la Guerre d’Algérie en France (1962-2007) dans la littérature et le cinéma »? Ce sujet m’intéressant grandement, je le lirais bien volontiers.
Merveilleuse réponse à l’agressivité. Etant moi même en plein apprentissage, je prend note… Merci!
Super article !!!! très bien expliqué !!!!
Dans un site web, il serait judicieux de faire figurer un lien ou une rubrique « qui nous sommes ? » afin de pouvoir identifier l’origine des « auteurs » et du webmaster. Dans sa démarche scientifique, l’historien s’applique toujours à identifier, vérifier et valider ses sources. Dans votre site, qu’est-ce qui permet à un élève ou à un jeune en recherche d’information d’exercer son esprit critique en identifiant sa source documentaire ? pourquoi ne pas oser vous présenter comme le font tant d’auteurs de sites et de blogues pédagogiques fort bien faits. Merci d’y réfléchir.
Une réflexion sur la forme dialoguée de votre « cours » ; l’élève qui s’interroge et à qui vous répondez, est-il fictif ou bien en avez-vous véritablement mis un à contribution de façon authentique ? Dans ce cas, ce serait courageux et pertinent …
Ca me gonfle tous ces rageux qui n’ont rien d’autre à foutre que de critiquer. 😈
Si t’es pas content, retourne donc lire Wikipedia et nou emm*** pas.
Bravo Djinnzz, continue comme ça c’est toujours un plaisir de vous lire.
@Charzane : La Rubrique « Qui sommes-nous » existe bel et bien! Cliquez donc sur le point d’interrogation dans le menu en haut du site.
Vous comparez mon travail (et celui des autres contributeurs du site) au travail d’un historien. C’est très flatteur! Hélas, EtaleTaCulture n’a pas encore cette prétention et se veut surtout un espace de découvertes culturelles, plus qu’une source de savoir encyclopédique. Du moins, pour le moment…
Les lecteurs soucieux d’en apprendre davantage sur un sujet peuvent toujours se plonger dans les propositions de lecture « Pour Approfondir » située en bas de chaque article.
Je constate tout de même que l’Histoire semble être un espace de chasse-gardée… Laurent Deutsch, qui a pris le risque de mettre en pause sa carrière d’acteur pour se consacrer à l’Histoire, subit lui aussi les foudres des « vrais » historiens, son travail manquant soi-disant de rigueur…
Même si ses travaux n’arrivent évidemment pas à la cheville d’un « vrai » bouquin d’un « vrai » historien, ce n’est de toute façon pas ce qu’on lui demande!
Mêne constat avec Max Gallo lorsqu’il romance des faits historiques…
Bref, la vulgarisation (dans n’importe quel domaine d’ailleurs) a toujours fait bondir les experts! Et c’est bien dommage…
Concernant mon anonymat, je ne pense pas que mon nom et mon prénom apporte une quelconque plus-value au lecteur! Mais c’est très gentil de vous intéresser à moi. Comme vous me le proposez, j’y réfléchirais…
Concernant le petit Kevin, je suis encore une fois flatté que vous vous posiez la question de sa réelle existence ou non… C’est que je fais bien mon job! Dans le même genre d’idées, demanderiez-vous à Jostein Gaärder si l’héroïne de son roman Le Monde de Sophie est bien réelle? Je ne pense pas.
Je ne vois pas en quoi il serait « courageux » d’interviewer des vrais enfants… 😯
Pour conclure, je ne comprends pas les critiques que vous formulez. Tout comme je le disais à Djemaa Maazouzi, merci de me faire part d’éventuelles erreurs dans le texte que je me ferais un plaisir de corriger le cas échéant.
@Rulio : Merci pour vos encouragements! Je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin 😉
🙂
Encore une fois on nous presente cette guerre sous l’angle biaisé d’une partie d’anciens d’algérie (pieds noirs et militaires anti gaulliste) et qui s’impose au reste des français. L’angle sous lequelle en fait ce serait De Gaulle qui d’un bon matin aurait d’ simple humeur décidé de donner l’independance à l’Algérie. Evidemment ceci est complement faut et erroné.
Il faut juste rappeller que si militairement la situation lui etait favorable, sur le plan politique la situation l’etait devenue nettement rn faveur du FLN avec une population qui lui etait massivement acquise comme l’on demontré les grandes manifestations/emeutes populaires de fin 1960. En revanche l’option de la « troisième voie » qu’il defendait (Algérie autonome sous souverainté francaise) n’avait acquis aucun soutient populaire malgré les efforts consentit, notamment militaire.
C’est ce constat qui a convaincu de Gaulle que la negociation sur l’independance et avec le FLN seul deboucherait etait la seule solution au conflit.
cordialement
Ne pas oublier que la colonisation de l’Algérie est partie de la volonté française de détruire la piraterie et l’esclavagisme des Barbaresques… Combien d’Européens chrétiens se sont retrouvés vendus sur les marchés d’esclaves ?