L’Histoire de France en 10 minutes chrono 1
Prêt pour un marathon de plus de 2000 ans à travers les méandres de l’Histoire de France? Alors commençons sans plus attendre, le voyage risque d’être long!
Version idéalisée de Vercingétorix
Au commencement était les Celtes. « Celtes », c’est un peu le mot fourre-tout pour qualifier les multiples peuples habitant en Europe de l’Ouest à partir, grosso modo, de l’an 500 avant Jésus-Christ. L’étoile montante de cette époque en Europe, c’est bien sûr la Grèce. Qui se souvient d’un Celte célèbre? Pas grand monde! Des Grecs, en revanche, de Periclès à Socrate, en passant par Pythagore ou Homère, on en connaît à la pelle. Mais, tout comme les Grecs antiques, les peuples celtes semblent incapables de s’unir pour créer une nation forte qui puisse s’élever contre un ogre à l’appétit vorace. Cet ogre qui dévore tout sur son passage à partir de l’an -200, c’est bien sûr Rome.
Les Romains ne font rien comme tout le monde et nomment les Celtes les « Gaulois ». C’est Jules César en personne qui nous le dit dans son best-seller La Guerre des Gaules (« Ceux qui se nomment dans leur propre langue Celtes et dans la nôtre Gaulois »). Pour quelle raison? On n’en sait fichtrement rien. Ce sont donc des « Gaulois » que Jules César va affronter à partir de 58 avant Jésus-Christ. Jules César (qui, au passage, n’a jamais été empereur…) se heurte, comme tout bon écolier le sait, à une farouche résistance menée par Vercingétorix, un chef de guerre qui parviendra à unir les peuples gaulois pour repousser l’envahisseur. Y parviendra-t-il? Oui, au moins temporairement. Son grand fait d’armes a lieu à Gergovie où son intelligence tactique permet de remporter une éclatante victoire. Mais le siège d’Alesia (-52) par les troupes romaines sonnera le glas de la civilisation gauloise… voilà notre fier Vercingétorix qui doit jeter ses armes au pied de son adversaire et qui est amené à Rome les fers aux poignets. Il patientera 6 ans – le temps que Jules César achève la conquête de la Gaule – au fond d’une geôle sordide, le Tullianum, avant d’être exposé à une foule en délire lors du triomphe de Jules César (un défilé gigantesque où il expose au peuple romain ses butins et ses prisonniers de guerre).
C’est officiel, les Gaulois ne sont plus… Faites place aux Gallo-Romains!
Qu’a apporté Rome à la Gaule? Soyons honnêtes, beaucoup de choses. Des routes pavées facilitant les échanges entre cités, des aqueducs, un mode de vie plus « moderne »,… mais, surtout, la paix. La pax romana offre à la Gaule une période de paix de près de 500 ans, ce qui, de mémoire d’homme, reste exceptionnel dans toute l’Histoire de l’humanité.
Senatus Populusque Romanus – Le Sénat et le Peuple Romain, devise de la République puis de l’Empire romain
Nous voilà rendus en l’an 0. Auguste, le neveu de Jules César et premier empereur de Rome, règne en maître sur toute la Méditerranée. À vrai dire, l’Empire d’Auguste est très grand et même… trop grand. À ses frontières fourmillent des tas de peuples menaçants que les Romains ne s’embêtent pas à différencier. Vandales, Ostrogoths, Parthes,… tous ceux qui ne sont pas Romains sont appelés « Barbares ». Pratique. Et il n’y a que deux façons de s’occuper d’eux: les zigouiller ou les soumettre et leur imposer le roman way of life. La pax romana à un prix… Mais ce qui est dommage, avec les Barbares, c’est qu’ils sont trop nombreux. Et à peine soumet-on une région que d’autres peuples barbares se pressent aux nouvelles frontières. Ils sont fous, ces Barbares.
Oui, Rome est certes une civilisation éclairée mais elle n’a pas inventé le téléphone…
De l’an 0 à l’an 476, c’est une lente agonie pour un empire romain en perte de repères et assailli de toutes parts par les peuples voisins. Le principe même d’un homme seul à la tête d’un si grand Empire n’est plus possible. La moindre information dans un coin éloigné de l’Empire met des semaines avant arriver aux oreilles de l’empereur! Oui, Rome est certes une civilisation éclairée mais elle n’a pas inventé le téléphone… Une guerre civile éclate en 235 et les choses ne seront jamais plus comme avant. Sous l’impulsion de l’Empereur Dioclétien, l’Empire est alors partagé en deux régions, puis en quatre, chacune gouvernée par un César. Pour l’heure, tout ce beau monde doit encore rendre des comptes à Dioclétien… Cette tétrarchie, ou décentralisation avant l’heure, fonctionne plutôt bien, dans un premier temps du moins. Mais la boîte de Pandore est ouverte et, en 395, l’Empire est définitivement coupé en deux: c’est l’acte de naissance de l’Empire romain d’Occident et de l’Empire romain d’Orient.
L’Empire romain d’Orient connaîtra un destin exceptionnel long de plus d’un millénaire: il faudra attendre 1453 et la prise de Constantinople pour le voir s’écrouler! Belle performance. Son grand frère, côté Occident, ne fera pour sa part pas long feu et sera dissous moins d’un siècle après sa création, en 476.
Ultime soubresaut d’un Empire en fin de vie, l’Édit de tolérance de l’Empereur Constantin instituant la liberté des cultes (sorte d’Edit de Nantes avant l’heure, datant de 313) et l’interdiction 80 ans plus tard du paganisme par Théodose bénéficient à une religion: le christianisme. Les Chrétiens qui, hier encore, devaient se cacher et fuir les persécutions sont aujourd’hui triomphants. Il faudra désormais, pour les siècles et les siècles à venir, composer avec une Église sur-puissante…
Un Barbare ne ressemble pas vraiment à ça (mais je pense que vous vous en doutiez!)
Les cendres de l’Empire sont encore chaudes quand se confrontent les quatre principaux peuples barbares pour le contrôle de ce qui deviendra la France… Leur nom? Les Francs, les Burgondes, les Wisigoths et les Alamans. Bien malin qui, en cette fin du Ve siècle, pourra deviner laquelle de ces puissances politiques sortira du lot… Un certain Clovis est sur le point d’entrée en scène… La grande force de ce « Mérovingien » (du nom de son grand-père Mérovée), c’est d’avoir très vite compris que le pouvoir séculier (les chefs d’État) devait s’allier au pouvoir spirituel (l’Église). De son côté, l’Église à besoin d’un bras armé pour faire rentrer dans le crâne des mécréants les paroles des Évangiles, à coups de gourdins s’il le faut… Le célèbre épisode du Vase de Soissons est l’illustration parfaite de cette « alliance »! Quelques années plus tard, le jour de Noël de l’an de grâce 498, Clovis scelle cette alliance en la cathédrale Sainte-Marie de Reims en se convertissant au catholicisme, où Saint-Remi l’oint du chrême sacré. Clovis l’ignore, mais il vient par ce geste de façonner les 1500 années à venir…
Il à déjà battu les Alamans sur le champ de bataille (la bataille de Tolbiac en 496) et forgé une alliance avec les Burgondes en épousant la fille de leur roi (Clotilde) qui lui donnera quatre beaux fils. Clovis Ier s’attelle maintenant à l’anéantissement de la super-puissance du moment, les Wisigoths… ce sera chose faite en 507.
Trop occupés à assassiner leurs rivaux potentiels, les Mérovingiens délèguent la gestion du royaume à un Maire du Palais, sorte de premier ministre boosté aux hormones.
À sa mort, en 511, il léguera à ses fils un immense royaume. Problème: la tradition franque impose le partage du territoire entre tous les héritiers mâles… s’ouvre alors une période longue de près de 300 ans durant laquelle intrigues, complots et guerres civiles vont se multiplier. C’est une période étrange où les rois de France portent des noms aussi ridicules que Chilperic, Clotaire Childeric ou Sigebert et où les femmes se crêpent le chignon à l’instar de Frédégonde et Brunehaut. Trop occupés à assassiner leurs rivaux potentiels (qui sont bien souvent leurs frères, oncles ou cousins…), les Mérovingiens délèguent la gestion du royaume à un Maire du Palais, sorte de premier ministre boosté aux hormones.
Dans ce fouillis de rois insignifiants, rendons tout de même hommage à Dagobert qui, non seulement, n’a jamais mis sa culotte à l’envers mais, en plus, fut un excellent roi, conquérant et bon gestionnaire. Une denrée trop rare dans un océan de roitelets médiocres qui se succéderont après sa mort, en 639.
Charles Martel arrête les Arabes à Poitiers… Un fait d’armes pas si glorieux!
En 691, un homme va tout changer. Son nom est Pépin d’Heristal et il occupe la fonction prestigieuse de maire du palais sur l’ensemble des royaumes francs. Alors que l’espérance de vie d’un roi mérovingien n’excède pas 25 ans, des guerres entre les héritiers du trône mettent régulièrement le pays à feu et à sang. Pour régler définitivement le problème, Pépin d’Heristal, alors au faît de se puissance, s’arroge le pouvoir de nommer les rois! C’est le monde à l’envers! De là le mythe des rois fainéants… Non pas qu’ils ont un long poil dans la main, ces braves rois mérovingiens, mais ils sont tout simplement dépossédés de leur prestige et de leurs prérogatives royales par des maires de palais devenus trop puissants pour qu’ils puissent s’opposer à eux!
Le fils de Pépin d’Heristal, un certain Charles Martel, continue dans la lancée de son père. Quand, en 732, il « arrête les Arabes à Poitiers », comme tout bon écolier le sait, il transforme ce fait d’armes peu glorieux (les Arabes ne comptaient de toute façon pas rester sur un territoire aussi éloigné de leur base arrière) en une victoire éclatante, se forgeant au passage une légende de défenseur de la chrétienté pour les siècles à venir… Joli coup de comm’, y’a pas à dire!
S’inscrire en protecteur du pape, Charles Martel n’en demandait pas tant!
Épisode moins connu mais Ô combien symbolique, c’est le pape en personne qui fait appel directement à lui pour protéger l’Eglise contre les Lombards. S’inscrire en protecteur du pape, Charles Martel n’en demandait pas tant! Il accepte bien sûr de secourir Grégoire III et donne une raclée aux Lombards. Le pape saura s’en souvenir…
Au tour de son fils Pépin le Bref, maintenant, de transformer l’essai marqué par son père et son grand-père. Ne l’oublions pas, Pépin le Bref n’est toujours « que » maire du palais et ne jouit pas du prestige de la fonction royale. Qu’à cela ne tienne, il écrit au pape « au sujet des rois qui n’exerçaient pas le pouvoir, s’il était bien ou non qu’il en soit ainsi ». Le pape, se sentant redevable de lui (et surtout de son père) répond qu’« il vaut mieux appeler roi celui qui a, plutôt que celui qui n’a pas le pouvoir ». Pépin le Bref a gagné… C’était presque trop facile!
En 751, il rassemble les seigneurs Francs qui, selon la volonté papale, ratifient son accession au trône. Adieu Mérovingiens, une nouvelle dynastie vient de naître: les Carolingiens.
Quant au fils de Pépin le Bref, il n’est autre que le grand Charlemagne. Nous sommes aux alentours de l’an 800 et la France entre dans une nouvelle ère…
Lire la suite: De Charlemagne à Philippe Auguste
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Djinnzz
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Très intéressant!
J’ai hate de lire la suite
Il est faux de dire que l’empire romain commencent a se désagréger a partir d’Auguste, l’apogée Romaine est située au IIeme siècle après JC. C’est a partir de Commode que les choses partent en vrille 🙂
Oui c’est vrai, cette partie n’est pas assez développée. Mais j’ai en tête de faire bientôt une « Histoire de la Rome antique en 10 minutes chrono » où j’aurai l’occasion de réparer cette imprécision!
Si Jules a appelé les Celtes « Gaulois » (gallus en latin qui signifie coq !) ne pourrait-il y avoir un rapport avec cet animal, roi de basse cour ?
Mais alors, pourquoi les Celtes »Anglais » habitaient-ils au Pays de Galles et les « Ibères Espagnols », Celtes eux aussi, la Gallice ?
Bonjour Eurosix!
Il me semble que cette histoire de coq est une invention tardive… C’est la France du XIXe siècle, post-révolutionnaire, en recherche de nouveaux symboles, qui déterrent le mythe très fédérateur de « nos ancêtres les Gaulois ».
Si on s’en tient à la chronologie, il apparaît en effet que les Gaulois ne sont pas du tout nos ancêtres! Mais plutôt les Francs de Clovis…
C’est à cette même période qu’on associe le mot « gallus » au coq qui devient du même coup le symbole de la France.
Une vaste fumisterie, en somme!
La réelle étymologie du mot Gaulois est encore incertaine…
Bonjour Djinnzz et merci pour votre explication. Pour ma part, j’ai toujours pensé aux Wisigoths qui ont occupé le Grand Languedoc avec la Provence pendant 4 ou 5 siècles. Mais, si mes souvenirs sont encore bons, ils ont été chassés par les Francs de Clovis. Le roi Wisigoth qui a marqué la Languedoc s’appelait, je crois, Alaric. Il existe encore dans l’Aude »la montagne d’Alaric » ! Mais, déjà à cette époque, il y avait un tel brassage de population, Phocéens, Phéniciens, Ibères (le roi d’Aragon a régné sur une partie du Midi de la »France » sans oublier Jules et les Romains… Bref : D’où venons-nous ?
Mais cela ne nous éclaire pas sur le coq dont les origines se trouveraient en Inde selon le dictionnaire… !
C’est brillant et passionnant!
Simple mais pas simpliste,
Amusant, mais juste ce qu’il faut.
Je suis moi aussi impatient de lire la suite!!
Mince, je viens de comprendre l’histoire de France pour la première fois… 😛
Amusant, le challenge, et brillant.
Vrai vulgarisateur!
Pas envie de jouer les grincheux et de relever les imprécisions de langue.
Mais… un contresens s’est quand même glissé:
« La grande force de ce « Mérovingien » (du nom de son grand-père Mérovée), c’est d’avoir très vite compris que le pouvoir temporel (les chefs d’État) devait s’allier au pouvoir séculier (l’Église) ».
En fait, le pouvoir « séculier » est bien le pouvoir temporel, et non celui de l’Eglise.
Etymologie: « dans le siècle », le monde donc.Il y a ici sans doute une confusion : le clergé « séculier » existe bien, mais c’est en opposition avec « régulier »: le clergé qui est « dans le monde » (les curés de paroisse, etc.) par rapport à celui qui est dans la « règle » monastique.
Le pouvoir « temporel » s’oppose donc au pouvoir « spirituel », ou « religieux », tout simplement.
Outch, vous avez raison. Je vais corriger ça de ce pas, merci! 😉
J’ai appris tellement de choses ! 😮
Bien joué ! J’arrive enfin à faire un lien entre les différents évènements !
Je vais garder cet article sous la main et passer au suivant ! :p
Autant que je me souviennes, Dagobert était forcément un conquérant, vu qu’il régnait sur « à peu près » tout le territoire de Clovis (Ier, hein, faut pas confondre…)