Nous sommes le 7 novembre 1805. Du haut d’une montagne, Meriwether Lewis et William Clark savourent le moment: sous leurs yeux s’étend l’Océan Pacifique. Les deux hommes en pleureraient presque de joie! Soutenus par le Président Thomas Jefferson (troisième président des Etats-Unis, de 1801 à 1809), les deux explorateurs ont obtenu deux ans plus tôt une subvention de 2500 dollars pour traverser le continent d’est en ouest. Ils montent alors un corps expéditionnaire d’une trentaine d’hommes et s’embarquent dans l’une des aventures les plus ambitieuses de l’époque.

Voilà plus de deux siècles que Christophe Colomb a posé le pied sur le continent, et le Nord-Ouest du territoire américain est pourtant encore une terre (presque) inconnue. La seule richesse de la région étant les fourrures et les peaux de bêtes, seuls quelques trappeurs sont assez fous pour s’y aventurer. Un autre problème de taille se pose également: les Français possèdent la Louisiane, un territoire immense, équivalent à près du tiers de la surface des Etats-Unis actuels, qui coupent toutes possibilités d’expansion vers l’Ouest. Lorsque, en 1803, Thomas Jefferson achète la Louisiane à Napoléon pour quelques 80 millions de francs, il ouvre la porte de son pays vers l’Océan Pacifique.

C’est moi Lewis, c’est toi Clarke

L’expédition de Lewis et Clarke est importante à plusieurs niveaux. Elle permet bien sûr d’affirmer aux Indiens la souveraineté des Etats-Unis sur leur territoire (à la façon « pousse-toi de là que je m’y mette »), mais aussi de nouer des relations commerciales avec eux (dur exercice d’équilibriste). Elle est également une aubaine pour les botanistes, les biologistes et autres géographes qui peuvent accroître leur connaissance du pays…

Les deux aventuriers le savent, ils vont avoir besoin d’un guide pour traverser les territoires hostiles qui les attendent. Ils ne tardent pas à faire la rencontre d’une indienne nommée Sacagawea qui a toutes les qualités requises: connaissance du terrain et des peuples indiens dont elle sert d’intermédiaire. Sans son aide, il est très probable que Lewis et Clarke ne soient jamais parvenus à l’issue du voyage…

Le voyage, justement, est extraordinairement long! Après 16 mois à naviguer le long du Missouri, ils abandonnent leurs embarcations et s’engagent à travers les Rocheuses. Deux ans après leur départ, ils arrivent enfin au Nord-Ouest du territoire actuel des Etats-Unis et y construisent un fort: le Fort Clatsop. Leur périple est terminé et il est maintenant temps de songer au retour. Dans leur sillage, une vague de colons s’apprête à leur emboîter le pas… Excités par la nouvelle aventure et des rêves pleins la tête, des milliers d’Américains partent à la recherche de terres fertiles sur lesquelles ils pourront s’installer et vivre de la terre.

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La Conquête de l’Ouest – Expédition de Lewis et Clark

Imaginez cette masse d’hommes (très peu de femmes prennent part aux premières expéditions) qui partent vers un territoire inconnu. Leurs chariots sont lents… ils doivent donc partir au mois de mars pour espérer passer les Rocheuses avant l’hiver. Beaucoup de dangers sont au rendez-vous! Les Indiens ne sont d’ailleurs pas forcément les pires: contrairement à l’image d’Epinal, bien loin de vouloir à tout prix agrandir leur collection de scalps, ils essaient surtout de voler les caravanes. Qu’on se le dise, le choléra fait bien plus de ravages dans les rangs…

La propagande du gouvernement pour inciter la population à s’installer dans l’Ouest est très efficace. En cinquante ans, plus de 7 millions d’Américains tentent l’aventure. En quête d’un nouvel Eldorado, bien nombreux sont les colons à déchanter dès leur arrivée…

Cette migration fait néanmoins les affaires d’une petite communauté: les Mormons. Pour leur mode de vie particulier (polygamie, croyances « étranges »,…), ils sont persécutés partout où ils passent. Ils cherchent donc un endroit peinard pour pouvoir vivre librement. Ils s’installent dans une région désertique, près d’un grand lac salé et fonde une ville: Salt Lake City. Ils vont faire de cet enfer sur terre leur petit coin de paradis.

Portrait d’un Indien pris par le photographe Rinehart (1898)

Les rapports avec les Indiens ne sont pas forcément mauvais. Du moins, au début… Avant 1776, les relations sont de type gagnants-gagnants. Après l’indépendance, les choses changent: les visages pâles ont la nécessité de conquérir des terres pour s’installer. Les Indiens ne sont certes pas nombreux, mais ils ont besoin de vastes espaces pour mener leur vie de nomades. A force d’être repoussés, les Indiens sont acculés et la coexistence avec les visages pâles n’est plus possible. Environ 10 millions à la fin du XVe siècle, les Indiens d’Amérique du Nord ne sont plus que 250 000 en 1890. Vous me direz, c’est toujours plus que la population de bisons qui, elle, passe dans le même temps de 60 millions à moins de 1000… (source: Stanley A. Freed, La grande aventure des Indiens d’Amérique du Nord)

La bataille de Fort Alamo (assaut final, 6 mars 1836), gagnée par les Mexicains

Le quart Sud-Ouest des USA (du Texas à la Californie) appartient encore au Mexique. Fort Alamo est assiégé en 1836 par les Mexicains. Le célèbre Davy Crockett s’illustre d’ailleurs dans cet épisode. Des colons américains viennent s’installer au Texas, alors que le territoire ne leur appartient pas. Une fois bien implantés, ils se rebellent contre les forces mexicaines et le Texas devient un Etat indépendant en 1845. Il porte d’ailleurs sur son drapeau une seule étoile, la « lone star ». Aujourd’hui, beaucoup d’émigrants mexicains viennent s’installer dans ces Etats du Sud des USA, créant les problématiques politiques que l’on connaît. Au fond, il s’agit pourtant là d’un territoire qui leur appartenait il y a 150 ans!

Quoi qu’il en soit, le Mexique est contraint de céder le Texas et la Californie. Parce qu’un malheur n’arrive jamais seul, on découvrira bientôt que de l’or en grande quantité se trouve en Californie. Une fortune colossale passe sous le nez de ces pauvres Mexicains… qui ne pourront pas prendre part à la Ruée vers l’Or!

Les premiers chercheurs d’or de Californie

En 1849, donc, de l’or est trouvé en Californie… La Ruée vers l’Or commence, ce qui grossit considérablement la vague de migration. Le Colorado, le Montana, la Californie deviennent les nouveaux Eldorados pour les citoyens du Monde entier qui souhaitent s’enrichir rapidement. Même les Chinois viendront en masse dans la région (ne vous-êtes-vous d’ailleurs jamais demandés pourquoi il y a souvent un Chinois de service dans presque tout bon western qui se respecte?!). Les Européens, eux, sont obligés de contourner le Cap Horn pour participer à la fête: trois mois de voyage à l’issue bien incertaine! Eh oui, le canal de Panama ne sera inauguré qu’en 1914…

Bientôt, la ruée vers l’or se transforme en ruée vers les plaines où se formeront de gigantesques fermes et feront les beaux jours des cow-boys. L’heure est venue pour le gouvernement américain de faciliter les échanges entre les différentes régions de leur immense pays. L’épopée du rail peut maintenant commencer!

Le fil barbelé, l’invention qui a favorisé l’essor économique américain!

Une des inventions qui bouleverse totalement l’organisation du territoire américain est… …le fil barbelé! C’est tout simplement révolutionnaire: en protégeant les terrains du passage des troupeaux, les ranchs peuvent maintenant prospérer sans risques!

Note: une première ébauche de cet article est paru sur le site en juin 2012.