Le cauchemar de Carrhes, ou le plus cinglant camouflet de l’armée romaine
Pompée, Crassus et Jules César sont les trois hommes forts de la République romaine et se partagent le pouvoir au sein d’un triumvirat. Pompée vient de s’illustrer à la tête d’une brillante campagne militaire et vient de soumettre la péninsule ibérique. Jules César est en train de conquérir la Gaule. Crassus ne veut pas être en reste! Il sent que son argent – il est alors considéré comme l’homme le plus riche de Rome – ne suffit pas pour acquérir une légitimité politique aux yeux de la plèbe. Non, ce qu’il lui faut, c’est un glorieux fait d’armes! Le terrain de l’Ouest étant déjà occupé par Pompée et Jules, le regard de Crassus se porte naturellement vers l’Orient. En 53 avant Jésus-Christ, sa décision est prise. Voulant à tout prix s’illustrer quelque part et se rêvant déjà en nouvel Alexandre des temps modernes, il se lance tête baissée à l’assaut de l’Empire parthe, une « importante puissance politique et culturelle iranienne dans la Perse antique ».
Voilà à quoi ressemblait le Moyen-Orient en 50 av. JC… Carrhes est situé au nord de la Mésopotamie, totalement en aval du Tigre et de l’Euphrate, au niveau de l’actuelle ville d’Harran en Turquie. (carte créée par Cplakidas)
Son armée est puissante et, pour vous en convaincre, imaginez donc près de 50.000 hommes aux muscles saillants et en petite jupette. C’est sûr, l’ennemi n’a qu’à bien se tenir! Mais un « détail » a visiblement échappé à Crassus… dans le désert, il fait chaud! Orgueilleux comme pas deux, il choisit de ne pas écouter ses conseillers qui l’implorent de faire un détour et préfère prendre le chemin le plus court en coupant par le désert… Après des semaines de marche forcée à travers les plaines arides du Moyen-Orient, les soldats n’en peuvent plus. Pourtant, il va falloir combattre, déjà l’armée ennemie se profile à l’horizon. Les Parthes ont pris Crassus de vitesse et comptent bien en découdre avec l’ambitieux Romain.
Un « détail » a visiblement échappé à Crassus… dans le désert, il fait chaud!
Peuh! À peine 11.000 cavaliers lui font face. Une bagatelle, Crassus en jubile d’avance! Et c’est ÇA qui a tenu en échec l’empire romain si longtemps? La victoire et la gloire est à portée de main! Fidèle au mode de combat romain, Crassus positionne ses troupes en carré, chaque homme bien caché derrière son bouclier. Les salves de flèches tirées par les Parthes obscurcissent le ciel. Mais bientôt, Crassus le sait, les ennemis seront à court de munitions et ses hommes pourront se ruer au corps à corps. En attendant, il lui suffit d’être patient…
Fatale erreur! Les arcs parthes, très puissants, décochent des centaines de milliers de flèches qui rentrent comme dans du beurre dans les armures romaines. S’ensuit une débandade comme rarement l’armée romaine en a vécue. En deux temps trois mouvements l’armée romaine est décimée et Crassus capturé.
La déroute romaine à Carrhes contre les Parthes
Comment expliquer ce cuisant échec? Bien malgré lui, le général romain est confronté à une vision différente de l’art de la guerre, à laquelle ni lui ni les autres généraux romains n’ont encore eu à faire face. Habituée aux batailles rangées, aimant les chocs frontaux et développant une puissance brute, l’armée romaine ne peut pas faire grand chose face à une cavalerie légère, très mobile et évitant à tout prix le corps à corps. Qui plus est sous un soleil de plomb par lequel les armures romaines ressemblent d’avantage à un four qu’à une protection efficace!
Orodès, le roi de l’Empire parthe, aurait, selon la légende, fait couler de l’or dans la bouche de Crassus: « Rassasie-toi de cet or que tu aimes tant! », aurait-il dit. Si, vous aussi, cette histoire vous fait immédiatement penser à une scène du Trône de Fer durant laquelle Khal Drogo coule de l’or fondu sur la tête de Viserys en guise de couronne, c’est que nous avons les mêmes références littéraires!
Le cauchemar de Carrhes est à ranger au titre des trois plus grandes défaites de l’armée romaine, avec la déroute face à Hannibal (-217) et la campagne désastreuse de Teutoburg en Germanie (9 après Jésus-Christ). Quoi qu’il en soit, on ne peut pas dire que la mort de Crassus chagrine vraiment Jules César… et un rival de moins, un! Certains disent même que la traversée de l’Euphrate par Crassus est un des éléments déclencheurs qui poussa Jules César à franchir le Rubicon… Mais ça, c’est une autre histoire!
Les plus érudits d’entre vous connaissent certainement l’expression: « décocher la flèche du Parthe ». Maintenant que vous connaissez le contexte, vous pouvez en déduire sans mal sa signification imagée! Lors d’une dispute, se dit d’une petite phrase assassine qui fait mouche (on dit aussi « envoyer un SCUD »!).
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je découvre un site super et vous en remercie. Cordialement
il n’est pas nécessaire de me répéter.
Merci beaucoup! 🙂
Quelques erreurs, surtout sur le plan de la bataille, quelques interprétations, mais bon, l’intention est bonne:)
Viserys et non pas Vaeneris.
Exact, je suis impardonnable! 😳
(erreur corrigée, merci)
La plus grave erreur que peut faire un chef de guerre est de sous-estimer son adversaire.
l’arc des parthes est une petite merveille de technologie ; c’est un arc composite très puissant dans la fabrication duquel on trouve ( entre autre ) de la corne de buffle , des tendons , des colles etc ….