40 ans de Politique de la Ville
A la fin des Trente Glorieuses (au début des années 1970), de graves problèmes liés à l’urbanisation massive apparaissent. La monotonie architecturale, la ghettoïsation de la population, les dégradations volontaires en sont autant de symptômes que les gouvernements successifs tenteront de juguler. D’échecs en tâtonnements, retour sur 40 ans de Politique de la Ville. Le chemin est long, la route accidentée… attachez bien vos ceintures!
L’Info du Jour qui te permet de briller en société
C’est la Circulaire Guichard (du nom du ministre du Logement de l’époque, Olivier Guichard) qui met fin à la construction des grands ensembles immobiliers, le 21 mars 1973.
- La coordination HVS (Habitat et Vie Sociale)
Le 3 mars 1977, la toute première forme de coopération entre Etat et commune est créée: les conventions HVS.
Sous ce nom un peu barbare, se cache une procédure expérimentale dont le but est deréhabiliter certains quartiers « sensibles ». Au final, entre 1977 et 1980, à peine une quarantaine de site et à peine 50.000 logements seront concernés… Les limites du dispositif impose la création de nouveaux outils!
- Les rodéos de 1981: la réaction de la gauche
Durant l’été 1981, François Mitterrand et son premier ministre Pierre Mauroy, fraîchement élus, sont confrontés à des « rodéos » dans la banlieue lyonnaise. Les jeunes des banlieues volent des voitures en centre-ville et « s’amusent » avec avant d’y mettre le feu. Ce qui pourrait paraître pour une incivilité ordinaire prend figure d’affaire d’Etat. La gauche doit trouver une réponse appropriée, d’autant plus que ces évenements ont lieu parmi les classes populaires urbaines qui viennent massivement de leur apporter leur soutien électoral.
La réponse, elle tient en 3 lettres: VVV pour « Ville Vie Vacances ». Le concept est simple: les jeunes foutent le bordel dans les banlieues? On n’a qu’à les envoyer en vacances aux frais du contribuable!
– Pourquoi on envoie les jeunes des banlieues en vacances? C’est pas juste!
– Ca s’appelle la discrimation positive, Kevin! Sur le papier, l’idée est louable (donner plus à ceux qui en ont le plus besoin)!
A la fin de l’année 1982, le maire de Grenoble Hubert Dubedout remet un rapport sobrement intitulé « Ensemble, refaire la Ville ». C’est le texte fondateur qui marque la naissance de la « Politique de la Ville.
Nouvelles réformes, nouvelles initiales. Cette fois, c’est le dispositif DSQ qui est créé: « Développement Social des Quartiers », en parallèle aux « Missions Locales pour l’Emploi » qui permettent de fournir aux jeunes des stages d’intégration dans le milieu professionnel.
Et puis après ça, c’est la fête aux initiales: les ZEP, pour Zones d’Education Prioritaire sont inventées par le Ministre de l’Education Alain Savary sur le modèle britannique. Leur but? Encore une fois, renforcer les moyens éducatifs dans les zones où l’échec scolaire est le plus élevé.
Les CCPD, pour Conseils Communaux de Prévention de la Délinquance, créés dans les communes à risques, ajoutent une touche de prévention et de solidarité aux moyens répressifs. L’insécurité étant l’affaire de tous, cette démarche se veut participative
– Euh, c’est super tous ces trucs… Y’en a encore beaucoup?
– Rassure-toi, Kevin! On en a bientôt fait le tour!
ZEP, DSQ, Missions Locales et CCPD sont maintenant les quatre mamelles de la Politique de la Ville. Nous sommes en 1988.
- Le Contrat de Ville ou le renouveau de la Politique de la Ville
Les quatre dispositifs précédents sont bien sympathiques, mais ont un problème de taille: ils sont complexes à mettre en place et, surtout, ils n’agissent qu’au niveau des quartiers difficiles.
Mis en place en 1992, le Contrat de Ville permet non seulement de simplifier la législation mais également de raisonner à l’échelle de la ville dans son ensemble. Ce dispositif remporte un succès certain: plus de 200 contrats seront signés en 1994 qui concernent près de 1500 quartiers.
– Bon, j’espère que cette fois, c’est la bonne! Il y eu d’autres dispositifs après celui-là?
– Désolé de te décevoir, Kevin, mais… oui, il y en a eu! Un peu de patience, on touche au but!
En 1994, le Gouvernement Balladur y va de sa petite réforme…Il crée les GPU, les Grands Projets Urbains qui, cette fois, sont censés « favoriser la réinsertion urbaine du quartier dans la ville en agissant sur l’aménagement urbain, le développement social et économique local ». Dans la pratique, il s’agit d’un partenariat entre l’Etat, la Région, le Département et la Ville afin de permettre le financement d’infrastrcutures onéreuses (gymnases, transports en commun,…)
- Les Pactes de Relance pour la Ville (PRV)
1996… Nouveau Président de la République, nouvelle réformes… Les PRV ont pour mission de remplacer les Contrats de Ville. Ils ont un objectif plus large et une ambition plus grande, en touchant directement l’économie et l’emploi dans la ville. Une nouvelle carte de France se dessine, dans laquelle les villes sont classées suivant leur vulnérabilité. Attention, c’est la fête aux initiales!
Dans l’ordre croissant de priorité, les villes sont classées en 3 zones: ZUS (Zones Urbaines Sensibles), ZRU (Zones de Redynamisation urbaine) et ZFU (Zones Franches Urbaines).
Plus le quartier est dans une zone « sensible », plus il se verra octroyer d’avantages financiers ou économiques: exonération d’impôts pour les entreprises implantées en ZFU,…
- A l’aube des années 2000
Le 13 décembre 2000, en réponse aux nombreuses critiques des dispositifs GPU, le Gouvernement de Lionel Jospin opte pour un nouveau dispositif… Encore un! Cette fois, il s’agit de la Loi Solidarité et Renouvellement Urbains, dite loi SRU.
Certaines démarches deviennent maintenant obligatoires pour les communes: elles se doivent notamment de construire au moins 20% de logements sociaux.
La mixité sociale est un thème cher aux Gouvernements de gauche… Mais la possibilité pour les communes d’échapper à cette obligation en s’acquittant d’une taxe rend la mesure ineffective, de nombreux maires préférant payer la taxe!
- Jean-Louis Borloo change la donne
En 2002, changement de gouvernement, changement de politique! Le nouveau fer de lance de la Politique de la Ville est la loi d’Orientation et de Programmation pour la Ville et la Rénovation Urbaine, votée le 1er août 2003, qui s’inscrit dans la continuité du PRV (Pacte de Relance pour la Ville) et double, par exemple, le nombre de zones franches.
La caractéristique de cette nouvelle loi est le lourd investissement dans les quartiers sensibles: campagnes de démolition, de reconstrcution, de rénovation,… Tout cela coûte cher! Un EPIC (Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial) est créé, l’ANRU, pour gérer le budget conséquent de 40 milliards d’euros!
Avec cette loi, on revient à une vision sectorielle du problème, quartier par quartier: l’aspect social est pour l’instant mis de côté.
- Dominique de Villepin crée les CUCS
Nous sommes maintenant le 31 décembre 2006. Les Contrats de Ville dont on a déjà parlé sont maintenant remplacés par les CUCS, les Contrats Urbains de Cohésion Sociale. Et c’est justement ces nouveaux CUCS qui vont compléter l’aspect social de la loi Borloo de 2003.
Près de 500 CUCS sont ainsi créés, regroupant plus de 2.000 quartiers. Fadela Amara en choisit 200 parmi eux pour aller encore plus loin dans l’aide sociale: écoles de la deuxième chance, lutte contre les discriminations, aides à la création d’entreprises,… C’est le plan « Espoir Banlieues ».
En 40 ans de Politique de la Ville, le problème des banlieues est loin d’être réglé. Beaucoup d’expérimentations ont été menées, la succession des dispositifs prouvant que le bon angle d’attaque est difficile à trouver. Alors, les violences urbaines, une fatalité?
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