On s’est posé la même question pour la Fête des Mères. Cette dernière, on l’a vu, est une tradition multi-séculaire remise au goût du jour localement en 1906 et qui s’est ensuite étendue dans la France entière en tant qu’outil de cohésion sociale après la Première Guerre Mondiale.

Mais les Pères, dans tout ça? On a beau remonter loin dans l’Histoire, on ne trouve aucune célébration en leur faveur avant le XVe siècle (ce qui est déjà pas mal!). C’est l’Eglise catholique qui instaure la Saint-Joseph le 19 mars (Joseph le beau-papa de Jésus, pas Joseph le fils de Jacob laissé pour mort dans le désert par ses frères). Jusqu’à présent, Joseph n’était pas un personnage très célèbre du Nouveau Testament – après tout, ce charpentier n’a rien fait de vraiment extraordinaire. Ni martyr, ni apôtre, il fait même un peu d’ombre à Dieu en personne avec son statut d’époux de la Vierge.

Mais son statut d’homme humble et de travailleur acharné joue en sa faveur: il devient THE modèle à suivre: un modèle effectivement très pratique pour convaincre les foules besogneuses de continuer à besogner sans rouspéter. Une campagne de pub est lancée par l’Eglise au tout début du XVe siècle, et Joseph devient le saint-patron des ouvriers, des artisans et… des pères de famille. Mais toujours aucune trace de collier de nouilles ou de cendrier en pâte à modeler.

Bienvenue à clichés-land, le pays où on offre forcément un rasoir à son papa (et un fer à repasser à sa maman?)

La fête des Pères « moderne », telle que nous la connaissons aujourd’hui, est très récente. Elle date de 1910 et tient ses origines aux Etats-Unis. Une inconnue du nom de Sonora Louise Smart Dodd rendit hommage à son père qui, étant veuf, éleva seul ses six enfants. Elle choisit la date du 19 juin, tout simplement parce que c’était l’anniversaire de son papounet adoré. Et comme elle n’avait rien d’autre faire, elle fit une campagne marketing pour que soit instituée une fête pour tous les papounets du monde entier. Et qué sé apélorio la Fête des Pères.

Sonora Louise Machin était bien gentille, mais elle voulait que la Fête des Pères soit organisée tous les ans le 19 juin, en hommage à SON papa. Le président de l’époque Calvin Coolidge marcha dans la combine et officialisa cette Fête à partir de 1924. Plus tard, en 1966, le président Johnson trouva l’idée un peu mégalo et calma les ardeurs de la jeune femme en décrétant que la Fête des Pères aurait désormais lieu tous les troisième dimanche du mois de juin.

Les Français, eux, attendirent 1952 pour copier les Américains et importer cette tradition en France. Soit 27 ans avant le tout premier McDonald’s qui s’implantera en France, à Strasbourg, en 1979. Ne cherchez pas de rapport, y’en a pas, mais l’info est intéressante.

Alors, la Fête des Pères est-elle une invention marketing ou une tradition historique? Ben… étant donné les éléments susmentionnés (la classe, ce mot), je n’en sais fichtrement rien. Mais bon, souhaitez toujours une bonne fête à votre papa, ça ne coûte rien et ça lui fera forcément plaisir, même s’il dit le contraire…

Petite anecdote du jour
Il existe aujourd’hui trois écoles pour la Fête des Pères:
– les pays n’ayant pas voulu rompre avec la tradition catholique fêtent les Pères le 19 mars, jour de la Saint-joseph, comme au Moyen-Age (Portugal, Espagne, Belgique, Italie et sûrement d’autres)
– les pays qui trouvent que les USA c’est super cool et qu’on devrait tout faire comme eux parce que c’est vachement bien, eux, reprirent en cœur le principe du troisième dimanche de juin (France, Angleterre, Afrique du sud, Tunisie, Turquie et sûrement d’autres)
– les pays qui s’en tapent et qui font rien comme les autres, en choisissant une date totalement différente (23 août au Népal, 26 décembre en Bulgarie, 6 janvier en Serbie, et sûrement d’autres)