Aujourd’hui, c’est économie! On va aborder un sujet qui est très à la mode en ce moment dans les médias: les dettes souveraines.

Il y a deux ou trois ans de ça, les Français ont découvert avec stupeur qu’ils vivaient à crédit depuis des années. Parce que jusqu’à présent, c’était pas grave: pour rembourser la dette, on empruntait sur les marchés financiers, et puis voilà. Ce comportement auto-destructeur devait forcément avoir une fin…

Bon, jusque là, rien de bien nouveau: les médias nous en parlent jusqu’à satiété. Par contre, ce que l’on sait moins, c’est que lorsqu’un Etat émet des dettes, ce sont principalement d’autres Etats qui les achètent. Ben oui, c’est logique. Comme ça, lorsque ces mêmes Etats émettront des dettes, ils compteront sur la France pour les acheter à leur tour.

Bon, les dettes, on est bien d’accord, on est aujourd’hui obligés de les contracter. Sinon, quid du salaire des fonctionnaires, des retraites, de la protection sociale, et j’en passe? Du coup, les économies de tous les pays européens deviennent inter-dépendantes et tout le monde a intérêt à faire durer ce petit jeu de dupes le plus longtemps possible…

Tout le monde doit de l’argent à tout le monde: on s’y perd très facilement! Mais c’est sans compter le génie d’un schéma bien foutu… A l’heure actuelle, les dettes souveraines européennes peuvent se résumer ainsi:

Dois-je préciser que l’unité utilisée est le milliard d’euros, cela va de soi… Ça fout les chocottes, hein?

Alors clarifions un peu les choses: pour des gens normaux, quand Pierre doit 4€ à Paul et que Paul doit 7€ à Pierre, on simplifie le problème en disant que Paul ne doit plus « que » 3€ à Pierre.

Ce raisonnement, un gamin de 8 ans est capable de le tenir (sauf Kevin, m’enfin, passons). Pour parler de ce flux d’argent entre les différentes filiales d’une banque, les pontes de la finance, eux, ils emploient un terme super compliqué: le netting interbancaire. Je suis un peu mauvaise langue car c’est en fait un poil plus compliqué quand tous ces échanges sont internationaux, mais qu’importe, vous avez compris le principe.

Des petits génies d’une école de management américaine (ironie, quand tu nous tiens) ont eu l’idée d’appliquer le netting interbancaire aux problèmes de la dette souveraine. Et vous allez voir que le schéma ci-dessus se simplifie quand même vachement beaucoup (oui, je sais, Charles-Henri, vachement beaucoup, ce n’est pas français mais je dis ce que je veux).

On y voit tout de suite plus clair, non?

On vient de supprimer, d’un coup de baguette magique et en appliquant un raisonnement mathématique de niveau CE2, plus de 60% des dettes souveraines. La magie de la Finance. J’adore.

Alors, il faut quand même modérer un peu nos ardeurs. Et d’une, le schéma ci-dessous ne porte que sur les dettes entre pays européens. La dette réelle, forcément, porte sur tous les pays du monde et ne se limite pas à la seule Europe. Et de deux, ce ne sont pas les Etats qui rachètent les dettes, mais les banques des Etats, nuance… Et de trois, un milliard emprunté à l’Allemagne n’a pas la même valeur qu’un milliard emprunté à la Grèce… (taux, durée, risques,…).

Oui, en fait, on dirait bien que la baguette magique n’existe pas. Mais le netting a au moins le mérite de clarifier les chiffres et de comprendre à quel point les Etats sont devenus inter-dépendants. Et on comprend tout de suite mieux pourquoi le défaut de paiement d’un de ces pays entraînerait des effets en cascade dévastateurs…