La tragique histoire de la photo la plus célèbre de tous les temps
Qui n’a jamais vu cette célèbre photo de Kevin Carter montrant un enfant soudanais en train de mourir de faim sous les yeux voraces d’un vautour prêt à se jeter sur lui?
Mars 1993. Le photojournaliste alors âgé de 32 ans se rend au Soudan armé de son seul appareil photo, bien décidé à y voir plus clair sur les raisons de la famine et de la guerre civile qui sévissent dans le pays. Alors qu’il se rend dans un village du Sud-Soudan, il tombe sur un enfant aux chairs déformées par la faim en train d’agoniser sous un soleil de plomb. L’image est déjà insoutenable en soi, mais bientôt un charognard vient se poser derrière lui. Splendide. Le photographe tient là une image puissante, symbole de toute l’horreur de la situation soudanaise. Patient, il attend que le vautour déploie ses ailes pour donner encore plus d’impact à son cliché. En vain. Après une bonne demi-heure d’attente, il quitte les lieux, les yeux remplis de larmes. Cet effroyable spectacle vient de changer sa vision du Monde à tout jamais.
Quelques jours plus tard, le New-York Times s’empare du cliché et le publie en page 3 de l’édition du 26 mars 1993. L’image provoque l’émotion, bien sûr, mais également la polémique. Qu’est-il arrivé à l’enfant sur la photo? Le photographe a-t-il fait la moindre action pour l’aider? Des centaines – des milliers! – de lecteurs écrivent au journal pour faire part de leur indignation. Tant et si bien qu’un éditorial est publié peu après pour expliquer que l’enfant, d’après ce qu’ils en savent, a pu regagner un camp de réfugiés. Est-il vivant? Mystère…
Kevin Carter, le photojournaliste au cœur de la polémique
Le cliché soulève évidemment des questions éthiques liées au rôle du photojournalisme. Le photographe est-il là pour intervenir? A-t-il une obligation de réserves qui l’empêcherait, quelques soient les circonstances, d’intervenir pour changer le cours de l’action qui se déroule sous ses yeux? Épineuse question…
Quoi qu’il en soit, Kevin Carter a le bonheur d’apprendre qu’il remporte le prix Pulitzer l’année suivante grâce à sa photo. Le bonheur? Non, pas vraiment… Ruiné, couvert de dettes, accro à la drogue et surtout tourmenté par toutes les horreurs dont il a été témoin durant ses différentes missions en Afrique, Kevin Carter n’est plus que l’ombre de lui-même. Le 27 juillet 1994, il se donne la mort dans sa voiture et laisse un simple mot pour expliquer son geste: « Je suis déprimé… sans téléphone… sans argent pour le loyer… sans argent pour la pension alimentaire… sans argent pour mes dettes… sans argent!!! Je suis hanté par les vifs souvenirs de tueries et de cadavres et de colère et de douleur… d’enfants mourant de faim ou blessés, de fous de la gâchette, souvent des policiers, de bourreaux… Je suis parti rejoindre Ken [Ken Oosterbroek, un ami journaliste mort 3 mois plus tôt d’une balle dans la tête en mission en Afrique du Sud, ndlr] avec un peu de chance ».
« La fillette et le vautour », cliché de Kevin Carter montrant l’horreur de la famine au Soudan (Mars 1993)
En 2011, Alberto Rojas, un journaliste espagnol obsédé par le cliché mythique de Kevin Carter, décide de mener sa contre-enquête. Les premiers témoignages qu’ils retrouvent sont accablants pour le photographe: il aurait laissé mourir l’enfant sans avoir rien tenté. Mais Rojas ne s’arrête pas là et s’entête à faire éclater la vérité au grand jour. Se rendant sur les lieux du drame, les langues se délient et il retrouve la trace de l’enfant. Il s’agit en réalité d’un petit garçon qui aurait survécu à la famine mais serait mort une quinzaine d’années plus tard du paludisme. Au moment-même où Kevin Carter attendait patiemment pour prendre le meilleur cliché possible, la propre famille de l’enfant était là, à quelques mètres de lui. Le photographe n’a donc pas laissé mourir un enfant livré à lui-même au milieu du désert comme il était tentant de le penser. Les conclusions de l’enquête d’Alberto Rojas sont sans appel: Kevin Carter ne mérite pas l’acharnement médiatique qui s’est déchaîné contre lui (source).
Six millions de personnes, dont la moitié âgées de moins de 5 ans, meurent de faim chaque année dans le Monde. Mais qui s’en soucie?
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Sur quoi vous appuyez-vous pour dire que cette photo est, je cite, « la plus célèbre de tous les temps »?
C’est une notion en effet toute relative que la « célébrité ».
Néanmoins, le site World’s Famous Photo (http://www.worldsfamousphotos.com/) a classé cette photo de Kevin Carter en tête de son classement des 25 photos les plus célèbres de tous les temps. (Je ne coinnais pas par contre la méthode qu’ils ont utilisé pour parvenir à un tel classement)
La question méritait en effet d’être posée, merci.
Quelle horreur cette image!
Ah, désolé, je dois y aller, y’a ma femme qui m’appelle pour passer à table.
😀
Humour noir.
J’aime ^^
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Fait!
Ca allège le porte-monnaie, mais ça allège aussi la conscience. Difficile de faire plus à mon niveau;
Photographe de guerre doit être un métier bien dur.
Les horreurs qu’il a vues ne peuvent pas s’oublier facilement, un peu comme le syndrome post-traumatique des vétérans de guerre.
Paix à son âme.
J’accuse les gens qui ont dénigré ce photographe non seulement de juger sans savoir mais aussi que lui au moins a fait quelque chose : il a montré le visage de la pauvreté.
Qui parmi tous ceux qui ont critiqué le photographe ont pris un billet direction le Soudan pour aller protéger des vies ? Qui parmi eux à donner leur énergie pour allez les aider ?
Celui qui montre du doigt le rapporteur d’information n’est-il pas plus cruel que l’informateur lui-même qui n’agit pas au moment présent?
La photo a rendu vivant le petit garçon aux yeux du monde et les gens ont pensé qu’à protéger le petit garçon, et pas à se dire qu’il n’était pas le seul dans cette situation. En gros, les gens n’ont rien compris par cette photo … et ont tué son immortaliseur.
Connais-t-on le sérieux de cette contre-enquête? Presque 20 ans plus tard, le journaliste aurait très bien pu inventer des témoignages et des documents de toutes pièces pour réhabiliter sa profession.
Pourquoi Kevin Carter ne s’est-il pas défendu de son vivant contre les attaques personnelles?
Cette histoire sent la manipulation à plein nez
La bien-pensance a fait une victime de plus.
Critiquer les journalistes reporters revient à tirer sur le messager: ça n’approte rien, mais ça soulage.