Un nain de jardin, c’est moche et ça ne sert à rien, j’espère qu’on est tous d’accord sur ce point!
Exhiber fièrement ses nains de jardin équivaut en effet aujourd’hui à étaler son mauvais goût au grand jour… mais également sa pauvreté. Véritable marqueur social, les nains de jardin ne se trouvent plus que dans des familles pauvres où ils côtoient parfois d’autres décorations aussi ridicules les unes que les autres (faux puits en plastique, statuettes « antiques » made in China,… la liste est longue!) et incarnent bien souvent les efforts inconscients et désespérés de masquer sa pauvreté au reste du monde.

(notez bien qu’il est aussi tout à fait possible que ces gens aient juste des goûts de chiotte)

Pourtant, il n’en a pas toujours été ainsi… Il fut un temps où le nain de jardin était à la mode et où on se battait pour avoir le modèle dernier cri! Retour historique sur un véritable phénomène de société.

L’origine gréco-latine

Au cours du XVe siècle, des mines de métaux précieux (or et argent principalement) sont exploitées en Cappadoce, cette région pleine de trous située en plein cœur de la Turquie actuelle.

Pour extraire les précieux minerais, il est nécessaire de percer de longs boyaux qui se perdent dans les profondeurs de la terre. Qui mieux qu’un nain pourrait s’acquitter de cette tâche? C’est donc tout naturellement que les exploitants des mines se mettent en chasse d’hommes de petite taille pour creuser le sous-sol et accroître le rendement de leurs exploitations.
On donne à ces mineurs des bonnets rouges rembourrés (l’ancêtre du casque de chantier…) et des vêtements de couleur vive pour qu’ils puissent être repérés de loin dans les entrailles de la terre.

(même si je doute que cela soit vraiment utile quand on est plongé dans le noir plusieurs dizaines de mètres sous la surface!)

Bientôt, on commence à se méfier des mineurs. Qu’ils sont laids et effrayants, ces petits hommes! Dans l’imagination populaire, on déterre alors la vieille légende des pygmées dont parlaient déjà Pline l’Ancien, Homère ou encore Aristote dans la Grèce antique. Ces êtres légendaires, hauts d’une cinquantaine de centimètres, vivaient, dit-on, dans de profondes cavernes et ne sortaient qu’à la faveur de la nuit.

(à ne pas confondre avec les vrais Pygmées qui vivent en Afrique et qui, pour le coup, existent bel et bien)

Et voilà nos mineurs assimilés à des êtres mythologiques et bientôt soupçonnés de pouvoirs démoniaques obtenus à force de côtoyer les puissances infernales du cœur de la Terre! De la simple méfiance, on passe carrément à la peur pure et irraisonnée. Pour exorciser cette peur, on a alors l’idée de fabriquer des petites statuettes à leur effigie qu’on place à l’entrée de chaque boyau… Le nain de jardin est né! Et avec lui le mythe du Nain vivant sous terre et passant ses journées à creuser la terre que l’on retrouve plus tard notamment dans l’œuvre de Tolkien…

L’origine germanique

Le concept de nain de jardin est né, on l’a vu, dans le courant du XVe siècle. Soit. Mais encore faut-il le rendre populaire, le démocratiser et le produire en grande quantité! Il faudra attendre les début du XVIIIe siècle pour assister à l’invasion de ces mignonnes affreuses statuettes dans nos jardins. La production en grande quantité a alors lieu en Allemagne. Le succès est fulgurant: un véritable effet de mode est lancé!

Et c’est ainsi que, trois siècles plus tard, on retrouve encore ces saloperies en céramique dans les jardins de l’Europe entière…