« Il faut détruire Carthage! » … Mais pourquoi, en fait?
Rappelez-vous, les guerres puniques sont une série de trois conflits entre l’invincible Rome et la fière Carthage (située au niveau de l’actuelle Tunisie et fondée par la mythique Didon) vers le troisième siècle avant Jésus-Christ. Des personnages aussi célèbres qu’Hamilcar et Hannibal s’y sont illustrés, pour le bonheur de nos chers têtes blondes qui apprennent le latin au collège ou au lycée.
Il faut dire que tout est réuni pour donner lieu à un conflit explosif: deux super-puissances se font face, seulement séparées par la mer Méditerranée. Surtout, Romains et Carthaginois sont fiers et orgueilleux et le partage avec l’encombrant voisin n’est pas concevable! Hannibal aura beau traverser les Alpes avec ses éléphants, Rome sort gagnante des deux premières guerres puniques. Mais en quelques dizaines d’années, Carthage réussit à redresser la tête et nargue de nouveau la République romaine: le jour viendra où elle aura le pouvoir de lutter de nouveau à armes égales avec Rome.
C’est dans ce contexte qu’intervient l’ancien censeur Caton (234 – 149). A Rome, les censeurs étaient au nombre de deux. Ils étaient chargés de faire le recensement de la population (d’où leur nom), de surveiller les mœurs des citoyens, et surtout de choisir les 300 sénateurs. Caton l’Ancien a joué un rôle majeur dans les guerres puniques, aussi bien politiquement que militairement. C’était également un écrivain qui nous a légués des écrits d’importance. Caton, donc, répète inlassablement au Sénat les dangers de laisser la puissance punique se développer.
Tant est si bien qu’il termine toutes ses interventions, (peu importe le sujet!) par cette célèbre formule: « Il faut détruire Carthage » (Carthago delenda est dans la langue de Tite-Live). A l’inverse, Scipion Nasica, sénateur n’ayant pas vraiment l’esprit guerrier, conclut ses propres discours en prônant l’exact opposé (« nihil temere faciendum »)! Ambiance, ambiance! De quel côté penchera la balance?
Finalement, si l’on se fie à Plutarque, Caton parvient à convaincre le Sénat d’agir grâce à… une figue. En effet, il présente une figue fraîche aux Sénateurs: « Sachez qu’elle a été cueillie il y a trois jours à Carthage: voilà à quelle proximité nous sommes de l’ennemi! » Cette petite mise en scène suffit, suivant la légende, à décider de la troisième guerre punique.
Le rêve de Caton s’accomplit finalement, puisqu’en 146 avant J-C., Carthage est définitivement rayée de la carte. Les guerres puniques auront duré plus d’un siècle. Rome a maintenant les mains libres pour prospérer et étendre son Empire…
L’Info du Jour qui te permet de briller en société
En 2002, « Il faut détruire Bagdad » était une phrase qui revenait régulièrement dans la bouche des dirigeants américains. Le 5 février 2003, juste avant la déclaration de guerre à l’Irak, le secrétaire d’État américain Colin Powell ne brandit pas de figues devant les caméras, lors de l’Assemblée générale de l’ONU.
Non, il leur préfère une version plus moderne: une fiole!
Et cette fiole, affirme-t-il au monde entier, contient de l’anthrax, produit massivement en Irak. Il confessera plus tard que son contenu était en fait inoffensif.
Toi aussi, étale ta culture! Mise en situation de l’Info du Jour
– Tu savais que pendant la Rome antique, Carthage avait été détruite grâce à de l’anthrax?
– De l’anthrax dans la Rome antique?
– Ouais, ouais, j’t’assure, j’ai lu ça sur #ETC!
– Mon pauvre Gérard… T’es vraiment pathétique!
[Oui mais il faut se concentrer un peu quand même… Comment voulez-vous éviter de passer pour un con, sinon?]
Les images d’archives, Colin Powell brandissant une fiole:
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Djinnzz
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Le parallèle entre la Rome antique & la guerre en Irak est intéressant.
Je connaissais cette mise en scène de Colin Powell.
Bon article, une fois de plus
tres interessant, merci
Merci à tous les deux! 🙂
Comparer la Rome antique et la guerre en Irak, fallait oser! Nan mais sériously, ce site il est trop intéressant en fait! 😎
Caton disait exactement « Carthago delenda est »
Très très intéressant le parallèle entre Caton et Colin Powell!
Par contre, est-ce un simple hasard ou y-a-t-il une volonté délibérée de Caton de plagier l’Histoire?
Je penche plutôt vers une coïncidence fortuite… ce qui n’en reste pas moins savoureux…
le texte original
« et excussa toga effudit: cujus quum pulchritudinem patres admirarentur, (…) « Atqui, inquit, tercio abhince die scitote decerptam esse Carthagine; tam prope ab oste absumus. »
Traduction littérale: « et secouant sa toge, il la fit voir à tous ; comme les sénateurs en admiraient la beauté, (…) [il déclara] « Pourtant, sachez qu’elle a été cueillie il y a trois jours à Carthage; voilà à quelle proximité nous sommes de l’ennemi. »
(PS: mon pseudo veut dire que j’aime le latin, pas les latinos! :))
Dans Les Lauriers de César, Residus Titus, l’avocat d’Asterix et Obelix, fait référence à cette phrase!
edit de Djinnzz: effectivement, bien vu:
Super intéressant, comme toujours! Je me rappelais de l’histoire de la figue dans mes cours de latin 🙂 Mais cette mise en contexte est bien plus instructive!
Attention: « Un écrivain qui nous a léguÉ des écrits… » 🙂