Le droit de cuissage n’a jamais existé!
Imaginez que vous êtes un paysan du XIIIe siècle. Vin Diou! La ch’tite Marie du village d’à côté, avec ces bonnes grosses hanches, vous vous verriez bien l’épouser. Seul petit problème, votre mariage dépend du bon vouloir de votre Seigneur, et, la ch’tite Marie étant très jolie, il y a fort à parier que ce dernier souhaite user de son droit de cuissage sur elle!
Voilà, en quelques mots, le résumé des fantasmes fortement ancrés dans l’imaginaire collectif sur les mœurs du Moyen-Age. La faute à Hollywood et à ses blockbusters décérébrés, sans aucun doute, mais également aux plus grands intellectuels du XVIIIe siècle!
Car, désolé de vous l’apprendre de façon aussi abrupte, le droit de cuissage est une pure invention du Siècle des Lumières, relayée par un certain Voltaire. Ce dernier n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai, c’est à lui également que l’on doit la légende du masque de fer!
Il semblerait que la légende du droit de cuissage prenne naissance à partir d’un mot volontairement (ou non!) déformé. Au Moyen-Age, le mariage était parfois interdit entre deux personnes habitant des seigneuries différentes, à moins de s’acquitter d’une taxe. Cette taxe est, au fond, assez logique: un des deux seigneurs va perdre un vassal, il est donc normal (selon les standards de l’époque, j’entends!) que ce seigneur lésé ait une rétribution financière. C’est le formariage, aussi appelée cullage, du latin cullagium (collecte).
Cullage… On comprend vite les dérives grivoises qu’un tel terme peut engendrer! Voltaire, Beaumarchais, et bien d’autres, s’en donnent à cœur joie, égratignant au passage une noblesse qu’ils exècrent. Le cullagium se transforme donc bientôt en droit de cuissage… Et tout le monde de s’offusquer de cette noblesse qui se croit décidément tout permis!
En réalité, outre le formariage (ou cullagium, donc), les seigneurs de l’époque auraient disposé du droit de jambage, consistant simplement à mettre sa jambe dans le lit conjugal, histoire de marquer son autorité comme il se doit. Bien sûr, on peut logiquement penser que certains Seigneurs aient abusé légèrement de leur prérogative, montrant à la belle autre chose que leur jambe… Mais il ne s’agirait là que de pratiques isolées, loin d’une quelconque législation les autorisant à cela! Et, franchement, que certains hommes abusent de leur pouvoir sur des femmes sous leur autorité n’est pas propre au Moyen-Age… si?
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Le titre de l’article est faux.
Il aurait fallu préciser: « La droit de cuissage n’a jamais existé… en France! »
Car l droit de cuissage a existé en Ecosse. Il fallait que les époux donnent 1 mark à leur seigneur sans quoi, celui-ci avait le droit de coucher avec la mariée.
Bon, je coupe les cheveux en quatre mais l’anecdote me semblait intéressante!
source: http://www.yrub.com/histoire/mensongecuissage.htm
J’ai été victime de harcèlement sexuel au travail pendant 3 ans. Heureusement, j’ai réussi à survivre face à cette épreuve et à trouver la force de m’extirper de l’influence de mon agresseur.
Le droit de cuissage existe depuis que l’Homme existe et existera toujours. C’est la conséquence de ces « mâles » qui se croient très forts dès qu’on leur donne un peu de pouvoir.
Florence, merci pour votre témoignage. Ca ne doit pas être facile a vivre ce genre de situations.
Mais, concernant votre conclusion, je pense que vous n’avez pas saisi une nuance:
ce qui est choquant avec le droit de cuissage, c’est que l’homme qui en bénéficie en a le droit. C’est peut-être une lapalissade, j’avoue, mais a contrario les hommes qui usent de leur pouvoir en pratiquant du harcèlement sexuel sont quant a eux hors-la-loi.
Il y a peu de différences entre les deux quand on est victimes, mais d’un point de vue sociologique la nuance est primordiale.
Ah la la… Ce siècle soi-disant des « Lumieres »…
C’etait un jeu très à la mode de l’époque de casser du sucre sur l’Ancien Régime, quitte à écorner légèrement la réalité…
Quand Jules Ferry arrive sur scène, c’est encore pire. Lui décidé carrément de colporter toutes ces bêtises sur les bacs de l’école… certaines bêtises étant encore apprises aujourd’hui!
*bancs et non bacs (désolé)
Lire sur le sujet Le Droit de cuissage, la fabrication d’un mythe d’Alain Boureau (1995).
Seuls 5 documents qui pourraient attester de l’existence du droit de cuissage au Moyen-Age existent. En s’y penchant de plus près, même ces 5 documents ne tiennent pas la route. Il s’agit donc d’une pure fiction juridique, fiction qui date du Xiie siècle.
En 1854, un débat s’ouvre (une « querelle » parmi d’autres à l’époque) dans lequel deux clans s’affrontent: les libéraux anti-cléricaux et les royalistes catholiques. Le but du premier clan étant de représenter l’Ancien Régime comme passéiste et inhumain.
Le mythe du droit de cuissage est ressorti pour décrédibiliser les royalistes.
Le pire, c’est que ce mythe continue à exister jusqu’à aujourd’hui, les références à « un droit de cuissage » lors d’affaires de moeurs ou de harcélements sexuels se multiplient dans les médias.
J’espère avoir apporté ma pierre à l’édifice!
Ça alors c’est de n’importe quoi.
Bonjour,
le droit de cuissage a bel et bien existé. Cela n’a pas été prouvé en France, mais cela fut attesté en Espagne. Voir la sentence de Guadalupe, arbitrage rendu le 21 avril 1486 par Ferdinand le Catholique à la suite d’une révolte paysanne. Plus d’info ici https://www.marxists.org/francais/engels/works/1884/00/fe18840000g.htm#sdfootnote39anc
Fouillant les archives depuis 40 ans je n’ai jamais rencontré un tel droit.
Quand une fille était grosse, après avoir succombé aux promesses du soupirant sous promesse de mariage, elle l’attaquait devant la justice de l’officialité et obtenait souvent dédommagement. On en retrouve dans les minutes notariales. J’ai même vu le père dédommager l’honneur de la plaignante, puis, contractuellement, prendre en charge l’enfant.
Les nobles étaient comme tous les autres, et il leur arrivait de copuler avec d’autres femmes que la leur. Et souvent ils reconnaissaient leurs bâtards, leur donnant leur nom, leur léguant terres ou autres biens.
Je ne parlerai pas des viols en pays conquis….