Les Papes se font-ils tâter les couilles?
S’il est une rumeur très répandue, c’est bien celle liée à l’intronisation d’un nouveau Pape: à peine élu lors du conclave, celui-ci, dit-on, doit se plier à une coutume séculaire… Nu sous une robe de chambre, assis sur une chaise percée, il doit se laisser tâter les parties intimes par le plus jeune des cardinaux.
Selon la tradition, l’heureux tâteur s’exclamerait alors:
– Duos habet et bene pendentes!
(littéralement « Il en a deux et elles pendent bien! »)
Ce à quoi les cardinaux répondraient en chœur:
– Deo gratias!
(« Rendons grâce à Dieu! »)
Face au ridicule de la situation, tout bon Étaleur qui se respecte en est réduit à se poser une seule et unique question: cette rumeur est-elle fondée ou sommes-nous, une fois de plus, les pauvres victimes d’une mystification honteuse?
Pour en avoir le cœur net, j’ai enquêté pour vous!
Enclenchons notre machine à remonter le temps et allons faire un saut en l’an de grâce 857. À la mort du pape Léon IV, tous les yeux se tournent vers un certain Jean l’Anglais (surnom qu’il a acquis après avoir longuement étudié Outre-Manche).
L’érudition du bonhomme est telle qu’il est surnommé le « Prince des savants ». Surtout, sa beauté est légendaire mais il n’en use pas pour séduire les jeunes demoiselles, vœu de chasteté oblige: jamais personne ne peut se vanter de l’avoir vu ne serait-ce que poser son regard sur une femme… Une qualité rare à l’époque, même chez les ecclésiastiques! Sans surprise, il est élu par l’ensemble du clergé pour assurer la succession de Léon IV. Et voilà notre Jean l’Anglais qui, acclamé par ses pairs, devient Jean VIII, chef de la Chrétienté!
C’est un excellent souverain pontife qui se consacre corps et âme à sa lourde charge, à tel point qu’il ne sort que très rarement de son palais. Le jour de l’Ascension, pourtant, il décide enfin de se rapprocher du peuple et participe, à dos de mule, à une procession qui traverse la ville de Rome.
Ce bain de foule lui permet de tester sa popularité: partout, les gens l’acclament sur son passage, on se bouscule pour tenter de toucher le Saint Homme. On raconte même que dans la foule, certaines femmes s’évanouissent devant la beauté envoûtante de Jean VIII… Alors que la fête bat son plein, un événement inattendu se produit: le Pape semble pris d’un malaise. Il se tord de douleur, tombe de sa mule et se retrouve étalé sur les pavés de Rome. Le dos contre le sol, il se tient le ventre à deux mains et pousse d’horribles cris de douleur. On accourt auprès de lui. Très vite, sous les yeux ébahis de la foule, sort de son bas-ventre un nouveau-né… Croyez-moi ou pas, mais le Pape Jean VIII vient à l’instant de donner naissance à un enfant!
Horrifiés, tout le monde se rend alors à l’évidence: le Pape Jean est une papesse. Après quelques secondes de flottement, la foule crie au sacrilège et se rue sur l’imposteur pour le mettre à mort. Mais on n’aura même pas à se donner cette peine: mère et enfant gisent déjà, morts, étendus sur le pavé. Victime de la colère divine? Sans aucun doute…
Telle est l’histoire de la Papesse Jeanne.
Le clergé ne sort pas indemne de cette mésaventure. Traumatisé par la supercherie, et pour éviter qu’un tel sacrilège ne se reproduise (une femme à la tête de la Chrétienté? Quelle horreur!), on décide alors de vérifier la « virilité » de tout Pape fraîchement élu… en lui tâtant les parties intimes.
C’est une jolie histoire, non? Et vous pourrez en vérifier la véracité en la retrouvant dans ses moindres détails dans beaucoup de livres écrits par des historiens sérieux… Pétrarque et Boccace en tête! Pourtant, cher lecteur, il est temps pour moi de vous faire une révélation fracassante: la papesse Jeanne n’a jamais existé. Rien, absolument rien, ne peut nous laisser penser que le Pape Jean VIII n’était pas un homme.
Cette « légende » vient probablement de la faiblesse qu’eut le Pape Jean VIII face au chef d’État byzantin Photius. De ce manque de courage politique, des critiques fusent de toute part: « Mais quelle gonzesse, ce Pape! », « Ce n’est pas un Pape, c’est une papesse! »
Une papesse? Une papesse.
Ce trait d’humour est pris au pied de de la lettre par des écrivains en manque de notoriété. Ce n’est qu’au XIIIe siècle (soit plus de 400 ans après les faits!) que la légende de la Papesse Jeanne est écrite. Tout bon conteur le sait, le diable se niche dans les détails: pour rendre une histoire crédible, il faut qu’elle soit truffée de faits précis, fussent-ils totalement inventés.
Le temps faisant le reste, on oublia la « vraie » histoire au profit de la légende, au point que même les archives du Vatican la mentionnent!
On ne manquera pas de songer à Bilitis, cette vraie fausse poétesse grecque qui naquit sous la plume de Pierre Louÿs…
Inutile de le préciser, la pratique consistant à trifouiller les parties intimes du chef de la Chrétienté n’a donc jamais existé… Oui, je sais, vous êtes un peu déçu en apprenant cette triste nouvelle… que voulez-vous, la culture apporte parfois son lot de désillusions!
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Je ne connaissais pas cette légende, et franchement, je m’en serais bien passé!
J’ai cette vision d’horreur des parties de Benoît XVI qui pendent. Beurk!!!!! 😕
Merci beaucoup pour ce commentaire très pertinent …
Article super, plein d’humour, comme le reste de votre site.
J’aime beaucoup!!!!!!
Je vous souhaite plein de réussites pour la suite
anecdote connue de notre part 😆
je comprends pourquoi certains ministres du cul-te commencent à chercher parmi les jeunes garçons leur futur chef 😈
Le titre donne l’impression que c’est une grosse connerie, pourtant le sujet est on ne peut plus sérieux!
Bien joué 😉
Cette légende contribue également à redonner une valeur « terrestre » au chef de l’Eglise.
En faisant asseoir le nouveau Pape sur une chaise percée, les cardinaux lui font alors passer un message du genre: Eh, OK, on t’a élu Pape. Mais reste les pieds sur terre, tu restes un homme comme nous.
En somme, cela revient à se faire tripoter les testicules pour éviter d’avoir les chevilles qui enflent…
vraiment dommage! en pensant à cette théorie (qui, dit en passant, est soutenue même par les francs-maçons) je ne peux m’empêcher de rire aux éclats en pensant au supplice que le nouvel élu doit subir en se faisant écraser les parties par ceux qui non seulement ne l’ont pas élu mais par ceux qui ne l’apprécient vraiment pas ……………..
je doute qu’une femme puisse comprendre à quel point ça peut nous toucher ………….
Je viens de vérifier la date de parution de l’article en pensant à un poisson d’avril… Bien joué « maitre » Djinnzz 🙂