[Rome antique] Combat à mort entre César et Pompée
Préambule
Sept ans seulement après la signature du premier « triumvirat », l’accord signé entre les trois hommes les plus influents de Rome, Jules César, Pompée et Crassus, vole en éclats. (les lecteurs intéressés peuvent lire cet épisode dans le détail ici.)
An 53 avant notre ère. Crassus meurt en Orient. Jules César, lui, continue sa conquête de la Gaule. Quant à Pompée, nommé consul unique l’année précédente par le sénat, il jouit (presque) des pleins pouvoirs à Rome.
Voulant se débarrasser définitivement de son rival, Pompée déclare Jules César hors-la-loi le 7 janvier -49. Apprenant la terrible nouvelle, le sang de Jules César ne fait qu’un tour: il quitte immédiatement la Gaule et entame une marche forcée vers Rome à la tête de son armée.
Pompée, ne s’attendant pas à une réaction si virulente, est pris au dépourvu. N’ayant pas de troupes sous la main pour s’opposer à Julius, il fuit Rome le 17 janvier avec la ferme intention de revenir lourdement armé…
Pompée: courage, fuyons
C’est la panique à Rome! Les farouches défenseurs de la République, Cicéron, Caton, Bibulus et même Brutus, le propre fils adoptif de César, affichent clairement leur soutien à Pompée et le suivent dans sa fuite. Première escale de tout ce beau monde à Capoue, mais pas le temps de profiter des délices de la ville pour autant… Pompée envoie des messagers auprès de Jules César pour tenter de mettre fin à cette folie. Rien n’y fait! Julius poursuit inexorablement sa marche forcée. Pire! Loin d’être accueilli froidement par les villes du nord de l’Italie, la populace acclame chaudement le chef de guerre!
Pompée envoie des messagers aux quatre coins du pays pour tenter de regrouper ses légions. En pure perte… Tout ça est long, bien trop long, et le temps joue en la défaveur du défenseur de la république.
Pompée et ses partisans quittent Capoue pour Brindisi et, de là, embarquent pour la Grèce. Le salut est en Orient! Là, il aura le temps de se constituer une force de frappe digne de ce nom. Surtout, il le sait, César ne dispose pas de flotte et ne pourra donc pas le poursuivre – du moins pour le moment…
En attendant, Jules César jubile. Voir le fier Pompée détaler comme un lapin à son approche, voilà qui le met de bonne humeur! Il rentre dans Rome en triomphateur, se fait acclamer par la plèbe (un p’tit bain de foule, on n’a rien trouvé de mieux pour faire monter sa cote de popularité) et, surtout, nomme des sénateurs qui lui sont tout acquis.
La première partie de son plan s’est déroulée sans encombre, mais il y a encore fort à faire…
Jules César, maître de l’Italie
Maintenant qu’il contrôle toute l’Italie, que faire? Partir à la poursuite de Pompée en Orient, ou assurer ses arrières en matant les sept légions fidèles à Pompée stationnées en Espagne? Dans le but de briser tous les soutiens de son ennemi, César choisit cette deuxième option.
Sa campagne militaire en Hispanie s’apparente à une promenade de santé… Au passage, il s’offre même le luxe d’assiéger Massilia (l’actuelle Marseille), qui a le malheur d’afficher ouvertement son soutien à Pompée. La ville tombera assez rapidement… Alors, c’est qui le patron!?
Ça y est, ses arrières sont enfin sécurisés. Le nouveau maître de Rome peut maintenant se focaliser sur son objectif principal: détruire Pompée. À cette simple pensée, l’œil de Julius brille d’un éclat inquiétant…
Petits meurtres entre amis
César embarque à Brindisi avec la ferme intention d’embarquer pour l’Épire. Premier problème: c’est Pompée qui est le maître de la mer Adriatique, avec une flotte gigantesque qui patrouille le long des côtes régulièrement. Profitant de la brume hivernale, Jules César parvient à traverser l’Adriatique discrètement… il débarque avec ses hommes le 4 janvier -48, soit 1 an presque jour pour jour après qu’il ait franchi le Rubicon!
Les troupes dirigées par son fidèle Marc-Antoine ne tardent pas à venir le rejoindre.
En bons stratèges, César et Marc-Antoine tentent une manœuvre d’encerclement des troupes pompéiennes. Manque de bol, Pompée parvient à échapper au piège en se retranchant, lui et ses 45.000 hommes, derrière les fortifications de Dyrrachium (actuellement Durrës, en Albanie). Une première bataille s’ensuit, non-décisive, qui se solde par la première défaite de César. Pour la première fois depuis longtemps, c’est lui qui est forcé de fuir!
S’engage alors un jeu du chat et de la souris entre les deux ennemis, chacun cherchant le terrain le plus propice pour remporter la guerre. C’est finalement dans la plaine de Pharsale, en Macédoine, au début du mois de juin -48, que va se jouer le dernier acte. Les escarmouches précédentes ont fortement affaibli les troupes de César, et c’est Pompée qui se retrouve en position de force. Jugez par vous-même: il dispose de plus de 70.000 hommes tandis que l’armée de César compte à peine plus de 30.000 soldats…
La bataille de Pharsale
Nous voilà rendus au 9 août -48. Les deux armées se font face. Bientôt, Pompée lance le signal d’attaque de sa cavalerie contre la cavalerie ennemie, comme il est d’usage à l’époque. Contre toute attente, les chevaux de César ne cherchent pas l’affrontement et se replient au dernier moment, laissant la place à une ligne d’infanterie cachée derrière. La mission des fantassins est claire: ne pas forcément chercher à tuer, mais plutôt viser les cavaliers adverses au visage! Jules César en est sûr, ces jeunes aristocrates inexpérimentés qui jouent aux guerriers sur leurs chevaux auront peur que l’on abîme leur beau visage et détaleront à toute allure… Ce pari est-il payant? Oui, assurément! Les cavaliers ne demandent pas leurs restes et fuient le champ de bataille…
Après avoir mis en déroute la cavalerie, l’infanterie perce le flanc gauche de Pompée composé d’archers. C’est une vraie boucherie… Puis, comme un jeu de dominos, les troupes de Pompée sont exterminées les unes après les autres. Bientôt, c’est la débandade, les hommes encore vivants lâchent leurs armes et quittent le champ de bataille en courant. Pompée vient de comprendre qu’il a perdu la partie… lui aussi s’éclipse discrètement…
Le bilan de la bataille est sans appel: 6000 Pompéiens tués contre à peine 2 ou 300 Césariens. 24.000 soldats ainsi qu’une vingtaine de sénateurs sont faits prisonniers. La victoire de Julius est éclatante!
Seule ombre au tableau: Pompée qui, on l’a vu, est parvenu à s’enfuir. Lui vivant, la guerre civile ne prendra jamais fin. Grrrr… Ce fourbe de républicain est comme une anguille, quand on pense le saisir, il nous file entre les doigts! Caton, lui aussi, a choisi la fuite plutôt que la reddition. Jules César l’apprendra plus tard, il se dirige droit vers l’Afrique et mijote un mauvais coup… rappelons-nous bien de son nom, nous en entendrons encore parler.
Cicéron et Brutus, eux, choisissent de se rendre à César. Quel terrible châtiment les attend? Une mort brutale ou une agonie lente et douloureuse ? Rien de tout ça, en fait. Contre toute attente, le maître de Rome les accueille chaleureusement et pardonne leur traîtrise!
Et Pompée, dans tout ça ?
Il n’a pas encore dit son dernier mot! Il parvient à rejoindre l’Egypte où, pense-t-il, ses soutiens politiques l’accueilleront les bras ouverts. Pauvre Pompée… s’il avait su !
Car à peine débarque-t-il sur la plage de Péluse où l’attend un des anciens amis qu’il est sauvagement assassiné puis décapité sur les ordres de Ptolémée XIII.
Le jeune pharaon a alors une douzaine d’années et est certainement très mal conseillé par ses ministres… Accueillir Pompée les bras ouverts aurait signifié s’opposer ouvertement à Jules César. Pas folle, la guêpe! Choisir le camp du vainqueur est bien plus rentable! En tuant Pompée, Ptolémée XIII espère donc se mettre le maître de la Méditerranée dans la poche.
Le stratagème a-t-il fonctionné? Non, loin de là: contre toute attente, Jules César est furieux!
Lorsque le Pharaon lui présente la tête de son ancien rival, César devient fou de colère. Son grand rival, Pompée le Grand ne méritait pas cette mort infamante ! On raconte même que Jules César aurait versé quelques larmes sur le corps de son ennemi…
Jules César, apprenti Pharaon
Pour la peine, César s’immisce dans la vie politique de l’Égypte et souhaite détrôner Ptolémée XIII, ce gamin qu’il méprise au plus haut point. Non sans mal, il parvient à ses fins et place la sœur de Ptolémée sur le trône d’Égypte. Son nom? Cléopâtre, évidemment! Femme à la beauté ravageuse (et au nez divin, dit-on), de qui il tombera bientôt amoureux… Neuf mois plus tard naîtra un petit Césarion…
Et c’est ainsi que Jules César intègre l’Egypte tout entière à l’Empire romain…
Il est grand temps pour lui de se remettre en route pour la guerre. Ses ennemis ne manquent pas et il lui reste encore fort à faire pour consolider son empire!
Veni, vidi, vici
Son prochain objectif? L’Asie mineure, où un gouverneur romain vient de se faire écraser par Pharsace II, roi du Pont et du Bosphore, qui tente de récupérer les territoires conquis par les Romains sous le règne de son père, le célèbre Mithridate. Les troupes de Jules César rencontrent celles de Pharnace II à Zéla, en 47 avant notre ère. Franchement, c’est une partie de plaisir pour Jules César qui écrase tout sur son chemin… Tant et si bien qu’il aura l’occasion d’écrire sa célèbre phrase dans une lettre qu’il adresse au Sénat: « Veni, vidi, vici » – « Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu ». Simple et efficace! (mais un peu arrogant sur les bords)
Epilogue
Les choses se présentent plutôt bien pour Jules César, qui a éliminé tous ses ennemis depuis qu’il a franchi le Rubicon deux ans auparavant. Tous ses ennemis, vraiment? Non! Caton d’Utique (je vous avais bien dit de garder son nom en tête) rassemble les débris de l’armée républicaine à Thapsus, dans l’actuelle Tunisie, et s’organise pour en découdre avec son ennemi juré…
Sortira-t-il vainqueur de ce nouvel affrontement?
La suite, c’est par ici!
(comme je suis trop fier de mon cliffhanger, t’imagines même pas.)
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Rome… J’ai adoré cette série, pour moi la meilleure série télé de tous les temps! 😉
Bravo pour ce dossier qui me fait revivre l’histoire.
Mais vous ne parlez pas de Marc-Antoine et d’Octave… Normal?
Moi aussi je me suis régalé devant Rome… La meilleure série de tous les temps! (bon, OK, je m’emballe un peu…)
Pour Marc-Antoine et Octave, patience, ils ne vont pas tarder à jouer un rôle important dans l’histoire… 🙂
La suite, la suite, la suite! 😉
Ce moment gênant où tu te rends compte que « Pompéien » ne signifie par « habitant de Pompéi » mais « partisan de Pompée »…
Merci pour la carte avec les tracés des parcours de César, parce que je commençais à être perdu !
J’ai pas eu l’occasion de le caser dans cet article déjà trèèès long, alors je le place ici.
(et comme ça, les lecteurs qui lisent pas les commentaires seront floués)
(ça leur apprendra)
Même si on n’en a jamais parlé sur ce site (oui, je sais), vous savez sans doute qu’Alexandre le Grand, Macédonien de naissance, a conquis une grande partie de l’Asie et de l’Égypte. Lorsqu’il meurt, en 323 avant notre ère, il n’a pas d’héritiers et son immense Empire est partagé entre une douzaine de ses généraux. Ces généraux successeurs portent un nom: les Diadoques.
Ptolémée est l’un de ces diadoques et fonde la célèbre dynastie égyptienne! Ptolémée XIII, l’assassin de Pompée dont il est question ici, en est le descendant direct…
Sans Alexandre, pas de Ptolémée. Pas de Ptolémée, pas de Ptolémée XIII. Pas de Ptolémée XIII et Pompée serait peut-être encore en vie. Bravo Alexandre, je ne te félicite pas.
L’effet Papillon appliqué à l’Histoire…
C’est très intéressant ! Merci ça m’a été très utile pour un devoir sur Jules César en Latin. Je trouve que c’est très bien expliqué. Encore merci…
J’ai pas très bien compris comment fonctionnait l’armée Romaine… y a pas un article dessus?
Répondez moi pour une fois…
voila
« Il voulut être César, il ne fut que Pompée » – Citation attribuée à Clémenceau à propos du Président Félix Faure, décédé en 1899 tandis que sa maîtresse, Marguerite Stenheil, lui faisait une fellation. Cette dernière fut par la suite surnommée « La Pompe Funèbre »…