Le nom de l’odeur de la terre après la pluie
Il en est des mots comme des personnes: dès le premier regard, on en trouve certains repoussants, et on se détourne d’eux sans la moindre envie de faire connaissance.
D’autres, au contraire, nous mettent en émoi et nous font battre le cœur, prémices d’une belle amitié, ou, pourquoi pas, d’une belle histoire d’amour.
Si le coup de foudre entre deux personnes existe, j’en suis persuadé, pourquoi n’en serait-il pas pareil entre un mot et son lecteur ?
C’est en tout cas ce sentiment que j’ai eu dès que je l’ai vu. Il était là, isolé au milieu d’une foule quelconque. Je l’ai regardé, cherchant à capter son attention, et je lui ai souri mais je ne pense pas qu’il m’ait vu.
J’étais pressé, hélas, et je dus me résoudre à l’idée que ce n’était pas le bon moment pour faire connaissance. Alors je poursuivis mon chemin, bien décidé à le revoir même s’il fallait pour cela que je force un peu le destin.
Et puis, trois semaines plus tard, je le croisai de nouveau au cours d’une de mes escapades littéraires. Cette fois, je ne voulais pas passer à côté d’une amitié pleine de promesses. Je me fis donc plus entreprenant, cherchant à sonder les mystères qu’il recélait. Nos retrouvailles furent intenses. Il m’avoua que lui aussi m’avait repéré le jour de notre première rencontre, parmi la foule de gens qui l’avaient croisé. Le cœur rendu léger par cette révélation, je lui pris la main, la caressai tendrement et, prononçant son nom avec délectation, je savourai chaque syllabe comme on savoure une madeleine sortant du four.
Il s’appelait pétrichor. Je lui aurais bien mis une majuscule mais, paraît-il, les noms communs n’y ont pas droit. Une discrimination honteuse de la part de l’Académie française, si vous voulez mon avis.
Avant de nous séparer, je lui promis qu’on se reverrait. Oh, pas tous les jours, bien sûr! Les belles rencontres ne doivent pas être détruites par la routine du quotidien. Mais de temps en temps, quand l’occasion se présenterait, je n’hésiterai pas à lui rendre visite.
Et à crier notre amour au monde entier.
***
Pétrichor (prononcez « pétriKor »): nom donné à l’odeur que prend la terre après la pluie. « Terme créé en 1964 par deux chercheurs dans la revue anglophone Nature, dénommant ainsi le liquide huileux secrété par certaines plantes, puis absorbé par les sols et roches argileux pendant les périodes sèches, et qui, après la pluie, dégage une odeur caractéristique en se combinant avec la géosmine, un composé organique d’origine microbienne. »
Formé à partir du grec petros signifiant pierre et ichor désignant le sang des dieux dans la mythologie grecque.
Exemple d’utilisation: « Ça sentait bon le blé et le pétrichor. »
____________________________________
Vous avez aimé cet article ? Alors j'ai besoin de vous ! Vous pouvez soutenir le blog sur Tipeee. Un beau geste, facile à faire, et qui permettra à EtaleTaCulture de garder son indépendance et d'assurer sa survie...
Objectif: 50 donateurs
Récompense: du contenu exclusif et/ou en avant-première
Je vous remercie pour tout le soutien que vous m'apportez depuis maintenant 5 ans, amis lecteurs!
Djinnzz
PS: ça marche aussi en cliquant sur l'image juste en dessous ↓↓↓↓
Là, je vous retrouve Djinnzz. Mais ce mot doit s’employer très rarement. Par contre, il y a un mot (peut-on l’appeler mot ?) que l’on entend sans discontinuer ou du moins très très ytès souvent (pour ne par dire plus) dans la moindre interview de n’importe qui : c’est »voilà » !
Bravo pour votre article littéraire alors que »voilà » n’a rien à y voir !!
Voilà ! Je n’ai pas pu me retenir de vous le dire !!
Merci, cher ami ! 🙂
J’ai connu ce site il y a deux ans, alors qu’il n’en était qu’à ses balbutiements, à une époque où son auteur cherchait encore son style.
C’était imparfait, maladroit, avec des articles parfois désespérément trop courts, parfois beaucoup trop longs.
Mais, allez comprendre pourquoi, j’avais une sorte d’attachement, une attirance magnétique qui me poussait à me reconnecter au site pour lire les nouvelles publications.
Et puis j’ai vu la métamorphose. Comme une larve qui se transformait en papillon sous mes yeux. Le passage intensif à Facebook qui fit grossir la communauté, le style plus littéraire que prit l’auteur, l’humour moins grossier, plus subtil, toujours distillé avec soin.
Je sais que ce n’est qu’un début. Que le bouche à oreille va fonctionner, que bientôt les lecteurs vont se multiplier. Comment pourrait-il en être autrement ? Je sais aussi que l’auteur gardera sa fraîcheur, son style particulier, ne cédant rien aux nécessités du grand public.
J’ai assisté à la naissance d’une perle, et, quand je lis l’article d’aujourd’hui, j’en suis fier.
Je ne sais pas si je mérite tous ces compliments, mais ça me fait très plaisir en tout cas !
😀
Très belle prose !
Déjà plus de 842 partages sur Facebook à l’heure où j’écris ces lignes… Les lecteurs ne s’y trompent pas !
Par contre, le mot en lui-même ne sonne pas très bien à mon oreille. « Pétrichor »… Je ne trouve pas ça très poétique !
C’est normal….comme pour tout coup de foudre….si il ne vous est pas destiné. …vous passerez à côté sans lui apporter autant d’intérêt que celui qui y est tombé amoureux. …
Mais quelque part il existe un autre mot qui sans doute produira le même effet je vous :-).
Moi aussi je l’aime ce mot….pétrichor. Et la comparaison avec le coup de foudre est d’autant plus pertinente que la naissance du pétrichor est consécutive à un choc thermique…celui provoqué par la pluie sur la terre chaude. Aussi, l’apparente dureté slave de ce mot laisse bien la place au carembolage que l’on imagine non?!
Le nom de la molécule chimique libérée est la géosmine, c’est elle qui donne l’odeur de terre si particulière que l’on aime dans une forêt, un peu moins dans l’eau ou le vin contaminés.
Bonjour, je suis nouvelle sur votre site et je l’aime déjà !
J’ai beaucoup de plaisir à découvrir vos articles et je les apprécie d’autant plus qu’ils sont bien écrits et exempts de fautes d’orthographe.
Cependant, j’ai remarqué une faute dans celui-ci : le mot « prémices » s’écrit, à mon humble avis, avec un « c » et non « ss ».
Modestement, Carine
Bonjour Carine !
En fait, les deux mots existent et ont une signification différente:
prémisses : proposition, fait, d’où découle quelque conséquence.
prémices : offrande religieuse prélevée sur les premiers fruits de la récolte.
Ici, c’est donc bien la version avec « ss » qui s’applique ! 🙂
Bon, eh ben… mea culpa : c’est bien vous qui aviez raison, Carine !
J’ai toujours commis cette erreur, et je viens de m’en rendre compte seulement maintenant, contrairement à ce que je vous ai répondu dans mon premier commentaire…
Tout est expliqué là : http://mlte.over-blog.com/article-la-difference-c-est-quoi-no-12-premices-ou-premisse-s-88511036.html
Merci à vous !
Ah merci ! Je n’avais pas vu votre réponse. Ca me rassure…
Djinnzz,
Est-ce qu’un jour tu arrêteras de m’impressionner ?
Bravo pour votre acticle
C’est tout mignon ça !
J’ai découvert le mot pétrichor dans Doctor Who, saison 6. C’est un superbe mot, on est bien d’accord.
Moi, je suis tombée amoureuse d’un autre mot, uniquement pour ses sonorités. Asphalte.
Toujours bon à savoir, thank you!