Nous avons déjà vu en quelle occasion Zeus descend sur Terre afin de juger par lui-même de la noirceur de l’humanité. Se déguisant en vieillard, il fait la connaissance des habitants d’Arcadie et de son roi Lycaon. Fou de colère face au comportement horrible du souverain, il déchaîne sa colère sur le Royaume et transforme le monarque en loup assoiffé de sang.
Mais Zeus a bien conscience que l’Arcadie est l’arbre qui cache la forêt. Partout où il va, il ne voit que malheurs et horreurs commis par les hommes, alors même que ceux-ci auraient tout pour vivre en paix et en harmonie. Ne voulant pas prendre de décisions sans y réfléchir intensément, il rentre dans son palais sur l’Olympe et convoque tous les autres dieux à une réunion exceptionnelle.

– Mes amis, l’heure est grave. L’humanité entière mérite une punition.
– Ah, cool! On a qu’à leur balancer des éclairs dans la tronche! J’adore ça, moi, tout voir brûler!
– Non, impossible, Hadès. Les flammes risqueraient d’être trop hautes et l’Olympe serait menacée.
– Tu pourrais aller baiser toutes les femmes de la Terre et enfanter des demi-dieux. C’est un boulot dans tes cordes, ça, mon petit Zeusounet d’amour. Non?
– Éh, oh, Héra! Pas de scènes de ménage en public, s’il te plaît. On réglera nos comptes plus tard!
– Euh… Et si on jouait au tir au pigeon? Je pourrais les buter un à un avec mes flèches, moi…
– Mais non, Cupidon, ça prendrait bien trop de temps!
– Je pourrais demander aux eaux de la mer de s’élever tellement que tout l’humanité périrait noyée.
– Ben voilà, ça c’est une idée du tonnerre, Poséidon!

Et c’est ainsi que Zeus ordonne aux éléments de se déchaîner. La moindre rivière, le moindre ruisseau sont mis à contribution pour engloutir la Terre sous les flots. Des nuages menaçants se forment, tandis que le Soleil arrête de briller. Très vite, étangs, marais, mers, fleuves,… tous les flots se rejoignent et ne forment qu’une seule immense étendue d’eau. Même les plus hautes montagnes n’échappent pas à la fureur des dieux et leur sommet autrefois si imposant se transforme en de vulgaires récifs à la surface d’un vaste océan. Les hommes qui tentent de survivre sur des embarcations de fortune sont aussitôt balayés par les vents déchaînés. Certains tentent bien de sacrifier leurs propres enfants pour apaiser la colère des Dieux, mais il est trop tard pour la miséricorde.
Les jours passent et la colère des éléments s’apaisent petit à petit. Bientôt, les eaux retrouvent leur calme. Seuls deux êtres humains, Deucalion et son épouse Pyrrha, ont survécu à cette terrible épreuve. Sur leur barque, réchauffés par les rayons de Soleil qui caresse enfin leur peau, ils scrutent les alentours. Aussi loin que porte leur regard, dans toutes les directions, ils ne voient que mort et désolation. Tout autour d’eux, des milliers – des millions! – de cadavres flottent dans une eau rougie par le sang. Surtout, un silence de mort règne maintenant sur la Terre.

Le Déluge, Léon Comerre, 1911

Zeus est heureux. Que le sort ait choisi Deucalion et Pyrrha, deux êtres au cœur pur, comme uniques rescapés est un bon présage. Le Dieu ordonne alors à la Terre de s’ouvrir et des brèches béantes absorbent les flots en un clin d’œil. L’immense océan se vide en un instant. La barque des deux amants se retrouve maintenant à sec, au milieu d’un désert aride. Zeus s’adresse en personne aux deux survivants, et leur ordonne de donner naissance à une nouvelle race d’hommes.
« Vous portez en vous l’avenir de l’humanité, dit-il. Et également mon plus grand espoir. »

Deucalion s’en donne à cœur joie auprès de sa dulcinée… Ayons un peu de pudeur, et laissons-les batifoler en paix!

Quelques compléments d’info sur le Déluge

Le Déluge et l’anéantissement de l’humanité est un thème récurrent dans énormément de religions et de mythologies. Que l’on pense à l’épopée de Gilgamesh, à l’arche de Noé, à Manu dans l’hindouisme sauvé par un avatar de Vishnou, etc. Mais ce châtiment ne marque en aucun la fin du Monde, mais plutôt la fin d’un cycle… La nouvelle humanité qui s’annonce est porteuse des plus beaux espoirs. Un genre de Monde 2.0, en quelque sorte.